La Chine, parce qu'elle est la Chine, dispose d'une capacité à peser sur les échanges. Lorsque ses importations de tourteaux de soja augmentent ou diminuent de 10 %, cela se ressent sur le marché mondial. Ce pays a constaté qu'il ne pouvait pas produire ce qu'il consomme. Il a d'abord renoncé à cet objectif s'agissant du soja et le fait aujourd'hui s'agissant des céréales, mais en sachant qu'il influe suffisamment sur les échanges. Je serais par exemple incapable de déterminer qui de la Chine ou du Brésil est dépendant de l'autre pour ce qui concerne le soja : le Brésil a besoin de la Chine pour liquider sa production et la Chine doit importer afin de nourrir le bétail que ses propres ressources ne suffisent pas à alimenter.
Ce poids de la Chine était celui des pays européens au XIXe et au début du XXe siècle. Ils faisaient les marchés mondiaux des produits de commodité ou des produits tropicaux. Entre les XVe et XXe siècles, la maîtrise des mers était un enjeu pour ces pays car ils cherchaient à maîtriser l'approvisionnement de produits d'importation : épices, produits tropicaux, café, cacao, etc. Ils ont ainsi voulu sécuriser leur système alimentaire, au sens large du terme. Cela ne se fait plus aujourd'hui : pour se fournir en café ou en cacao, on s'adresse au marché mondial, suivant une logique de commodité, afin de s'approvisionner en matières premières auprès de plusieurs pays producteurs.