Vous avez devant vous trois agriculteurs, directement touchés par l'autoroute. Elle passe à la limite de nos exploitations ou au travers, ce qui nous permet de témoigner de la réalité de cette infrastructure et de ses effets sur nos exploitations.
Je commence par répondre à la dernière question de votre questionnaire : de manière générale, quel est, à votre connaissance, le sentiment des exploitants agricoles ou des propriétaires vis-à-vis du projet d'autoroute ? Quelles sont les principales inquiétudes et les principales demandes ou attentes ? Une lettre ouverte, signée par plus d'une centaine d'exploitants agricoles et de porteurs de foncier, mettait en avant leur opposition à ce projet d'autoroute et en soulignait les conséquences : l'artificialisation des sols et des paysages, les effets environnementaux et économiques pour les exploitations agricoles, qu'elles soient directement touchées ou situées aux abords de cette autoroute. Un autre motif d'inquiétude s'ajoutait à cela : la construction de l'autoroute artificialisera plus de 300 hectares, mais aura aussi un effet d'urbanisation aux alentours, suscitant zones industrielles (ZI) et commerciales (ZAC), rocades secondaires et autres déviations pour les communes – autant d'artificialisations au détriment des terres agricoles, lourdes de conséquences pour nos exploitations.
Par ailleurs, la présence d'usines à bitume autour de Puylaurens et de Villeneuve-lès-Lavaur, qui pollueront certaines terres et leur production, préoccupe aussi nombre d'exploitants. Beaucoup pratiquent la vente directe : quelles conséquences auront les futures pollutions pour la nourriture des habitants de ces territoires ?
Comme cela a été évoqué par de précédents intervenants, les conséquences pour les exploitations proches du tracé sont peu prises en compte. Or nombre d'exploitants ont parfois besoin de se rendre dans des bassins de vie, à Toulouse ou à Castres, pour vendre leur production. Vu le prix annoncé des péages, cela fera peser une charge économique supplémentaire sur ces exploitants, ou leur fera perdre du temps, s'ils continuent d'emprunter la route nationale, dont le tracé va être modifié. Bien qu'indirectes, ces conséquences affecteront les agriculteurs, surtout ceux qui essaient de vendre leurs produits localement.
Pour revenir à vos questions sur les différents aménagements fonciers et les compensations possibles, la Confédération paysanne n'a été associée à aucun projet : la chambre d'agriculture a reçu un financement pour des compensations collectives, mais nous n'avons pas connaissance d'agriculteurs à qui il aurait été proposé d'intervenir et notre syndicat n'a pas pu participer à des discussions, ce que nous regrettons. Nous espérons qu'une véritable concertation aura lieu, incluant tous les agriculteurs du territoire, et pas uniquement quelques-uns, choisis par la chambre d'agriculture.
Les zones d'inclusion conduiront à constituer des réserves foncières. Dans ces territoires marqués par de fortes pressions foncières sur les terres agricoles, mettre en réserve des terrains limitera les possibilités d'installation de nouveaux agriculteurs, dont on parle beaucoup, et risque de susciter des tensions sur les exploitations existantes, voire des conflits entre agriculteurs. Un tel modèle ne résoudra pas tous les problèmes et ne permettra pas à toutes les exploitations de s'en sortir.
Enfin, les auditions précédentes ont fait état d'un faible nombre de contentieux, mais des exploitants ont pu faire l'objet de pressions, notamment de la part d'Atosca, pour régler ces conflits, ce dont je laisse mon collègue vous parler.