Je commencerai par répondre à la question de Mme Louwagie concernant le choix du ratio. Pour être parfaitement transparent avec l'Assemblée nationale, je considère que le ratio, contrairement au caractère nominatif des actions ou encore à la limitation de durée, n'est pas un garde-fou, mais un sujet de négociation entre les investisseurs et les entrepreneurs. Il ne revient pas à l'Assemblée de leur imposer tel ou tel ratio, sachant que toute modification ultérieure du ratio influerait sur l'investissement. En pratique, la régulation s'accomplira par la négociation entre l'investisseur, qui pourrait être dissuadé d'investir s'il juge que le ratio, trop élevé, diluerait trop ses droits de gouvernance, et l'entrepreneur qui voudra fixer un ratio suffisant pour y trouver son compte.
Il se trouve que le droit européen, cherchant à établir un compromis entre les places boursières qui autorisent les actions à droits de vote multiples et celles qui ne les autorisent pas, impose la fixation d'un ratio maximal. Ne souhaitant pas surtransposer le droit européen, car j'estime que la France souffre déjà de l'avoir souvent surtransposé, j'ai choisi une limite supérieure aux ratios que je considère comme réalistes. Dans le même esprit, j'aurais tout aussi bien pu fixer un ratio de trente pour un. En effet, je ne pense pas que des entreprises se doteront réellement d'actions à droits de vote multiples avec un ratio de vingt-cinq pour un, mais je souhaite laisser toute latitude aux entrepreneurs et aux éventuels investisseurs pour trouver l'équilibre adapté à une entreprise donnée. Le fin mot reviendra à l'entrepreneur puisque c'est lui qui décidera dans quelles conditions il fera entrer son entreprise en Bourse. Voilà où est le garde-fou.
Quant à l'amendement, qui vise de fait à ne pas fixer de limite à la durée des actions de préférence et à en faire une caractéristique définitive du financement d'une entreprise, j'y suis défavorable. En effet, le dispositif a pour but d'aider une entreprise qui entre en Bourse, ce qui explique qu'il soit limité dans le temps. Il n'a pas vocation à asseoir un actionnariat pendant des dizaines d'années, mais à soutenir les entreprises dans le moment de fragilité où elles décident d'être cotées en Bourse, sur un marché qui peut être très exigeant. Au bout de dix ans, dans le cas où 66 % des actionnaires – des actionnaires, et non des votes pondérés par les actions à droits de vote multiples – considèrent qu'il est dans l'intérêt social de l'entreprise de reconduire le dispositif, ils pourront le prolonger de cinq ans, ce qui permet de tenir compte de certains secteurs particuliers où il faut davantage de temps aux entreprises pour se développer. Au bout de quinze ans au plus, il convient en revanche de revenir au droit commun et de mettre fin aux droits de vote multiples.