Le 31 janvier dernier, dans sa déclaration de politique générale, le Premier ministre annonçait : « Il faut sortir de cette situation […], et je prends une décision claire : l'État prendra ses responsabilités et financera désormais l'accompagnement des enfants en situation de handicap sur leur pause déjeuner […]. C'est un enjeu de solidarité, de dignité et de reconnaissance. »
Le texte du sénateur Vial nous permet de concrétiser cet engagement fort de la majorité en faveur d'une inclusion renforcée, qui répond à une demande du terrain, particulièrement des collectivités locales.
La proposition de loi a un objectif unique, bien précis : la prise en charge par l'État de l'accompagnement humain des élèves en situation de handicap sur le temps méridien. Il ne sera donc pas question ici des conditions de travail des AESH, de leur rémunération ni même de leur fonctionnarisation, si importantes que soient ces questions, régulièrement débattues au sein de notre commission. L'amélioration des conditions d'exercice du métier d'AESH et des conditions de travail des enseignants qui accueillent des enfants en situation de handicap dans leur classe sont évidemment des priorités pour nous toutes et tous.
Le Conseil d'État a estimé en novembre 2020 qu'il revenait aux collectivités territoriales d'assurer la prise en charge des AESH pendant l'ensemble des temps périscolaires, notamment le temps méridien. Au cours des auditions, il nous a été rapporté que cette décision posait plusieurs problèmes, à commencer par la lourde charge financière qu'elle implique pour les collectivités et la rupture d'égalité de traitement des AESH selon les moyens dont celles-ci disposent. Or notre école républicaine doit demeurer un infaillible fer de lance du combat contre les inégalités, quelles qu'elles soient, et d'abord au profit des élèves.
Lors des auditions, il a souvent été affirmé qu'il importe pour ces derniers de garder leur AESH à leur côté durant le temps méridien, pour assurer une continuité de l'accompagnement tout au long de la journée. Si je comprends ce souhait et pense également que la continuité peut être bénéfique pour certains élèves, je précise que, pour l'heure, il n'existe pas de garantie que les élèves conservent pendant le temps méridien l'AESH qui les suit pendant le temps scolaire. Il faudrait pour cela que l'AESH soit d'accord pour augmenter son temps de travail et suffisamment formé à la prise en charge spécifique du temps méridien, différente de l'accompagnement des temps scolaires. De plus, il faudrait s'assurer, comme pour les agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles (Atsem), que les AESH bénéficient d'une pause pour le déjeuner.
Qu'en sera-t-il de la responsabilité des directrices et directeurs d'école ? Ils ne sont pas supposés travailler pendant la pause de midi, puisqu'il ne s'agit pas d'un temps pédagogique. Il faut donc que les AESH passent pendant ce temps sous la responsabilité des collectivités territoriales, même s'ils sont des personnels de l'éducation nationale, rémunérés en tant que tels sur ledit temps. Pouvez-vous, madame la rapporteure, nous détailler votre position sur ce point ?
Enfin, le transfert de charges des collectivités territoriales vers l'État pourrait intervenir dès le vote de la proposition de loi. Il faudrait donc prévoir un nombre suffisant d'ETP d'AESH pour la prise en charge de tous les élèves ayant besoin d'un accompagnement humain pendant le temps méridien, mais aussi anticiper l'augmentation du nombre d'élèves en situation de handicap qui pourraient rester à l'école pendant ce même temps. Je défendrai donc un amendement instaurant une date d'entrée en vigueur à la rentrée 2024 au plus tôt, pour laisser au ministère de l'éducation nationale le temps de préparer la mise en œuvre du dispositif. Sinon, je crains qu'il ne faille, comme nous l'ont dit les associations d'élus et d'usagers, déshabiller le temps scolaire pour habiller le temps méridien.
Le groupe Renaissance est favorable à cette proposition de loi tout en restant attentif à sa mise en œuvre : le texte ne doit pas créer plus de problèmes qu'il n'apporte de solutions.