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Intervention de Jean-Pierre Lacroix

Réunion du mercredi 14 février 2024 à 11h00
Commission de la défense nationale et des forces armées

Jean-Pierre Lacroix, secrétaire général adjoint aux opérations de paix des Nations unies :

Nous travaillons activement sur ce dernier sujet. J'ai rencontré le chef d'état-major de la force de la SADC, un officier sud-africain, ancien de la Monusco. Je ne peux vous faire part de détails à ce stade, mais nous pensons que ce soutien, s'il était accordé par le Conseil de sécurité, constituerait une mise en œuvre finalement assez cohérente du principe posé par la résolution portant sur les opérations africaines de paix, même si les moyens associés seraient légèrement différents, puisque ce soutien s'effectuerait à travers des moyens de la Monusco.

Ensuite, nous avons entamé le désengagement au Sud-Kivu, la date de finalisation du départ étant fixée au 30 juin. Nous devons relever un certain nombre de défis logistiques assez compliqués, dans la mesure où un grand nombre des implantations sont lointaines et peu accessibles. Par ailleurs, les capacités congolaises, notamment les forces en uniforme, se déploient lentement. Le vice-Premier ministre, ministre de la Défense, prévoit le déploiement de 2 000 soldats congolais au Sud-Kivu. Nous avons insisté sur cet élément, tant il est nécessaire d'éviter les conséquences négatives de notre désengagement en matière de protection des civils. Il est tout autant nécessaire d'avoir un engagement politique continu pour traiter les différents sujets de tension qui continuent d'exister au Sud-Kivu entre les différentes communautés.

S'agissant de la question plus générale du désengagement, notamment au Sahel, il existe aujourd'hui dans cette zone un problème de divergences d'objectifs politiques, des divisions au sein de la région. Il faut être réaliste, la marge d'action est fortement limitée. Néanmoins, nous allons malgré tout poursuivre au maximum notre engagement politique avec l'ensemble des pays de la région. De fait, la vocation des Nations unies consiste bien à ne jamais se désengager complètement et à continuer de travailler, sous d'autres formes, avec les Etats.

Cependant, à ce stade, l'appétit pour des actions et des initiatives communes au niveau de la région du Sahel est restreint. Le Burkina Faso, le Niger et le Mali se sont retirés de la Cedeao. Il faut essayer, dans toute la mesure du possible, de reconstituer l'unité politique des pays de la région. L'évolution de la situation sur le terrain dans ces trois pays et au-delà déterminera à mon avis l'évolution de l'appétit des pays de la région à retravailler ensemble ou non. Tel est le premier objectif que nous devons poursuivre, même s'il est lointain et difficile.

Entre-temps, d'autres situations méritent également d'être surveillées. Je pense notamment à celle, préoccupante, du Sénégal ; mais également à d'autres pays qui connaissent cette année des processus électoraux. En outre, il faut naturellement continuer de travailler avec les États qui veulent poursuivre la coopération en matière politique et sécuritaire. Encore une fois, il existe une demande évidente de capacitation de la part des États africains, c'est-à-dire un soutien leur permettant de mieux répondre à leurs défis de sécurité. Les problèmes de gouvernance sont évidents et ne doivent pas être éludés, même si l'évocation de ces sujets est souvent assimilée à une forme d'ingérence, nécessairement mal perçue.

Je le redis : nous devons mener un travail pour traiter les facteurs de conflit que j'ai précédemment évoqués, comme la criminalité transnationale organisée et l'exploitation illégale des ressources naturelles. Je ne soulignerai jamais assez l'importance de ces facteurs et la nécessité d'intensifier les réponses à y apporter, au-delà de ce qui est réalisé aujourd'hui. Nous disposons certes d'une organisation à Genève qui s'occupe de la drogue et du crime organisé, nous menons d'autres actions à travers certaines de nos missions, d'autres agences des Nations unies. Cependant, la dimension du problème et son rôle en matière de déstabilisation sont absolument majeurs. Comment mieux y répondre aux niveaux local, régional et global ? Malheureusement, nous n'avons pas assez de moyens, ni une organisation suffisante.

Enfin, au-delà de la nécessité pour nous de conduire peut-être des études de perception un peu plus détaillées, il convient sans doute de ne pas susciter d'attentes trop fortes concernant nos missions. Il me semble d'ailleurs que l'opération Barkhane a été confrontée aux mêmes problèmes.

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