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Intervention de Jean-Pierre Lacroix

Réunion du mercredi 14 février 2024 à 11h00
Commission de la défense nationale et des forces armées

Jean-Pierre Lacroix, secrétaire général adjoint aux opérations de paix des Nations unies :

Je dis souvent que la Finul ne met pas en œuvre la résolution 1701 ; elle soutient sa mise en œuvre par les parties. In fine, il revient aux parties libanaise et israélienne de mettre en œuvre cette résolution et de faire preuve de volonté politique en ce sens. Malheureusement, cela n'a pas été le cas jusqu'à présent, qu'il s'agisse de la présence des armes du Hezbollah au Sud-Liban ou des violations aériennes par Israël.

Cependant, malgré ce défaut de mise en œuvre par les parties de leurs obligations au titre de la résolution 1701, la Finul a joué avant le 7 octobre 2023 et continue de jouer un rôle fondamental en matière de prévention d'une escalade incontrôlée, que les deux parties veulent éviter. Aujourd'hui, nous sommes néanmoins dans une phase différente, pour les raisons que vous connaissez. Des échanges de tirs interviennent, dans le respect de certains paramètres, notamment le ciblage exclusif des objectifs militaires. Malgré tout, des victimes civiles sont parfois à déplorer et le risque d'embrasement demeure. De fait, nous constatons une intensification des moyens employés, des frappes de plus longue portée et des éliminations ciblées.

Avant le 7 octobre, il existait un mécanisme, dit mécanisme tripartite, permettant à un officier des Forces armées libanaises (FAL) et un des forces de défense israéliennes (IDF) de se réunir avec la FINUL pour parler de questions opérationnelles. Aujourd'hui, ce mécanisme ne fonctionne pas depuis le 7 octobre, mais des échanges se poursuivent via la FINUL entre l'armée libanaise et Israël. Cette liaison est constante. Elle permet de mieux assurer la sécurité de nos collègues et de clarifier certaines intentions lorsque des civils sont malheureusement atteints. Il en va de même dans le Golan syrien. En outre, la Finul patrouille toujours dans la zone du Sud-Liban et contribue tout de même à limiter les risques. La Finul est par ailleurs chargée d'organiser la déconfliction en cas de manifestations pacifiques, d'organiser le rapatriement ou le transfert des dépouilles, en clarifiant bien ses interventions pour éviter d'être suspectée d'appui à telle ou telle autre partie.

S'agissant des perspectives, des efforts sont menés par la France, les États-Unis et d'autres pays, afin de proposer des idées pour mettre fin aux hostilités au Sud-Liban et dans le nord d'Israël. Aucune négociation substantielle ne s'engagera tant que l'intensité des combats à Gaza ne diminuera pas de manière très sensible. Malheureusement, nous prenons le chemin inverse en ce moment, avec la perspective d'une offensive terrestre. Du côté du Hezbollah, la volonté d'escalade semble clairement absente. De leur côté, les Israéliens font part de leur préoccupation majeure de faire rentrer à leur domicile les 80 000 citoyens israéliens qui habitent dans le nord. Or ils ne souhaitent pas le faire tant que demeure selon eux un risque d'incursion similaire à ce qui s'est passé à partir de Gaza.

Par conséquent, une partie de la solution résidera dans l'éloignement de la ligne bleue d'éléments du Hezbollah, et notamment de ses brigades Radwan, qui sont en quelque sorte ses forces spéciales. Encore une fois, de nombreuses idées convergentes entre Américains et Français sont sur la table. Nous soutenons activement ces efforts diplomatiques et nous nous préparons au cas où des arrangements seraient conclus en faveur de la cessation des hostilités.

Dans ce cas, nous n'aurons pas la responsabilité de mettre en œuvre ces arrangements, puisque cela relève des parties, mais nous soutiendrons cette mise en œuvre et nous mesurerons le respect des engagements. Ensuite, il faudra adapter la présence de la Finul, notamment en termes d'empreinte, avec une possible évolution de nos moyens, notamment en matière de surveillance, en fonction du degré de coopération des deux parties. Enfin, nous travaillons pour identifier les critères nous permettant de déterminer si les parties respectent leurs engagements sur le terrain.

En cas d'embrasement, la marge de manœuvre de la Finul sera très limitée. Nous nous préparons néanmoins à cette éventualité, discrètement, de manière responsable.

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