La France joue effectivement un rôle très important en tant que membre permanent, en tant que ce que « plume », c'est-à-dire pays qui rédige les projets de résolution qui sont ensuite adoptés et qui portent sur les mandats de plusieurs de nos opérations. C'est le cas pour la RDC, le Liban ou la République centrafricaine. Par ailleurs, la France joue un rôle important de contributeur, de pays influent. Il existe d'ailleurs une assez grande synergie entre les orientations générales politiques du secrétariat des Nations unies et celles de la France sur les principales crises et les sujets globaux.
Nous sommes conscients des contraintes que rencontrent nombre de nos États membres en matière de finances publiques. Par ailleurs, nous sommes soumis à une grande rigidité qui nous est imposée par les règles mises en place par l'Assemblée générale dans l'allocation des ressources, notamment en ce qui concerne l'allocation des postes. Ainsi, une grande opération de maintien de la paix comprend des centaines, voire des milliers de postes. Des personnes sont ainsi attribuées à chacun de ses postes, mais les besoins évoluent au fil des ans, en lien avec les autres secteurs, impliquant parfois de procéder à des réallocations. De telles opérations sont particulièrement difficiles, car elles impliquent de recalibrer les postes, en fonction des décisions de l'Assemblée générale. C'est la raison pour laquelle je plaide en faveur d'une plus grande souplesse dans l'allocation et la réallocation des postes, qui nous permettrait de régler un certain nombre de problèmes.
Vous avez également évoqué les attentes de l'ONU vis-à-vis des pays contributeurs. À ce titre, il me semble important de poursuivre les efforts visant à établir des priorités très claires pour chaque mandat. La France a d'ailleurs fait des efforts dans ce domaine, mais il faut aller plus loin et sensibiliser les autres pays. L'essentiel porte ainsi sur le soutien aux efforts politiques lorsque nos mandats comprennent cette dimension, comme pour les missions multidimensionnelles en Afrique. La protection des populations est incontournable, mais elle ne doit pas être dépolitisée. Il importe également de soutenir les capacités ou le renforcement des capacités des États, dans la mesure du possible. La dimension des droits de l'Homme est importante, parce qu'il est difficile d'opérer dans des contextes où l'État hôte se livre à des exactions, des violations massives des droits de l'Homme. Nous devons également nous attacher aux priorités qui nous sont assignées, ce qui nécessite une meilleure coordination avec l'UE, les organisations régionales, les agences, les fonds et les programmes.
Vous avez également mentionné les lacunes et les défis auxquels nous sommes confrontés. Les mandats qui nous sont attribués sont aussi contraints par les ressources dont nous disposons. Ensuite, certaines lacunes sont liées au fait que la nature des conflits évolue très rapidement. Nous devons nous adapter, notamment à l'usage de technologies digitales, y compris dans le domaine de la communication. Il convient également de mieux travailler sur les nouvelles formes de mobilité. Nous essayons de plus en plus d'opérer une transition vers davantage de souplesse, ce qui n'est pas sans poser de problèmes. Cette souplesse implique ainsi d'utiliser davantage d'hélicoptères, à un moment où les moyens aériens sont difficiles à obtenir.
Par ailleurs, comme je l'ai déjà indiqué, nous devons être plus exigeants en matière de comportement et de discipline. À ce titre, nous avons récemment pris des décisions assez draconiennes d'expulsion de contingents entiers, parfois de pays contributeurs dans leur totalité. Mais il faut faire davantage d'efforts dans ce domaine et faire en sorte que nos outils d'évaluation de la performance soient mieux utilisés pour le suivi.
Le deuxième défi est d'un ordre différent. Dans certaines zones, comme au Sahel, nous sommes confrontés à des facteurs de conflits locaux, nationaux, mais également régionaux, comme le terrorisme, les trafics ou les activités illégales en tout genre. Or, en tant que système multilatéral, nous ne sommes pas très bien équipés pour traiter autant qu'il le faudrait ces facteurs de conflit. Il faut travailler collectivement sur ces limites, avec nos États membres.