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Intervention de David Taupiac

Séance en hémicycle du jeudi 4 avril 2024 à 15h00
Garantir un revenu digne aux agriculteurs et accompagner la transition agricole — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDavid Taupiac :

La faiblesse des revenus des agriculteurs et leur difficulté à vivre de leur métier sont au cœur de la crise agricole que nous vivons depuis ces derniers mois. Et ce n'est pas sans raison que le mouvement de colère est parti d'Occitanie, l'une des premières régions agricoles de France, mais aussi celle où les agriculteurs vivent le moins bien de leur métier, sachant que les exploitations, souvent familiales et de petite taille, sont touchées par des événements météorologiques extrêmes plus fréquents, par des épizooties et par un manque d'eau croissant.

Les situations varient en fonction de la taille des exploitations, des types de culture et des zones géographiques. Ainsi, selon l'Insee, 15 % des agriculteurs n'avaient perçu aucun revenu en 2021, alors que dans certaines filières, le salaire moyen dépassait 3 000 euros par mois. Au sein même du monde agricole, les avis divergent entre syndicats sur la manière de répondre à cette préoccupation. Le groupe LIOT est conscient qu'il n'y a pas de solution facile et qu'il faudra sans doute actionner plusieurs leviers en les adaptant à l'hétérogénéité du secteur.

C'est pourquoi satisfaire la revendication d'un revenu digne comme il nous l'est proposé dans ce texte n'est pas un exercice simple, même s'il est hautement souhaitable. Jusqu'à présent, le Gouvernement a tenté de relever le défi par la régulation des rapports entre les agriculteurs et la grande distribution. Mais après trois lois Egalim en quelques années, on ne peut que constater qu'elles ne parviennent pas à répondre à cette exigence, et ce pour de multiples raisons, dont la principale est l'insuffisance des contrôles, faute de moyens, de la DGCCRF, la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes.

Cette proposition de loi vise à compléter l'arsenal législatif existant en mettant en place des prix de référence, en deçà desquels les distributeurs et les industriels de l'agroalimentaire ne pourraient pas se fournir. C'est une solution simple à première vue, mais dont la mise en œuvre est d'une grande complexité – d'où notre étonnement que le Président de la République ait annoncé à la volée la mise en place de prix planchers, sans concertation et sans être capable de détailler les mécanismes sur lesquels ils seront fondés. Nous pensions que la majorité avait avancé sur la question mais nous avons constaté au cours des débats en commission qu'il n'en est rien. Vous réfutez toujours le dispositif ici proposé parce qu'il reviendrait selon vous à des prix administrés, mais vous êtes toujours incapable d'expliciter ce qu'entendait le Président de la République par des prix planchers.

La proposition de loi de notre collègue Marie Pochon n'est pas sans soulever des questions mais elle a un mérite : celui de mettre le sujet sur la table. Certaines dispositions vont selon nous dans le bon sens, telles que la prise en compte de la rémunération des agriculteurs, fixée à deux fois le Smic en commission, dans les coûts de production. Nos travaux en commission ont permis de lever certaines de nos interrogations et notre groupe se satisfait d'avoir vu l'ensemble de ses amendements adoptés, même si toutes les questions de fond n'ont pas été tranchées. Nous avons ainsi gagné en flexibilité grâce à l'adoption de deux de nos amendements qui permettraient aux prix planchers d'évoluer tous les quatre mois ou en cas de fortes fluctuations des prix agricoles. Par ailleurs, nous sommes favorables à l'autre mesure de la proposition de loi : la création d'un fonds de soutien à la transition agroécologique – d'autant que grâce à l'adoption d'un de nos amendements, ce fonds pourrait servir également à soutenir la filière bio, déjà en grande difficulté.

Alors que le nouveau projet de loi d'orientation agricole a enfin été présenté hier en Conseil des ministres, nous ne pouvons d'ores et déjà que regretter qu'il n'aborde pas la question, pourtant cruciale, du revenu. Il faudra donc attendre de nombreux mois encore pour qu'elle soit à l'ordre du jour, autant de jours de frustrations pour nos agriculteurs dont les premières déceptions sur ce projet de loi se sont exprimées dès hier. Aussi, nous pensons qu'il est plus que nécessaire de se pencher avec bienveillance sur le texte de nos collègues écologistes.

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