Notre volonté est, premièrement, de renforcer le pouvoir de négociation des agriculteurs pour qu'ils soient en mesure d'imposer davantage leurs prix face aux industriels et à la grande distribution et, deuxièmement, de contraindre les acteurs de l'aval à prendre davantage en compte les coûts de production des agriculteurs afin que ceux-ci ne puissent plus vendre à perte.
Je le disais, les agriculteurs eux-mêmes – à l'exception de la filière bovine – ne veulent pas de prix planchers. La raison est simple : les filières agricoles et agroalimentaires sont tellement complexes que l'instauration d'un prix unique par matière première pourrait évincer des pans entiers de notre économie agricole.
Prenons l'exemple de la filière laitière. L'équilibre économique de l'exploitation varie en fonction d'un grand nombre de paramètres : s'agit-il de lait de plaine ou de lait de montagne ? À combien s'élève l'apport protéique ou en matière grasse ? S'agit-il de lait bio ou conventionnel ? Est-il certifié ou labellisé ? L'éleveur est-il installé depuis longtemps ou non ? A-t-il réalisé des investissements de modernisation ou non ? Le lait est-il valorisé à l'export ou uniquement sur le marché intérieur ? Pour de la production de poudre, de beurre ou de fromage ?
Vous comprendrez aisément que, dans un tel contexte, imposer un prix unique serait totalement réducteur face à la complexité de l'économie agricole. Ce serait même contre-productif sans un système de contrôle des volumes.
Les exploitations qui ont des coûts de production inférieurs au prix plancher seraient incitées à produire davantage et à écraser les prix, évinçant les exploitations moins compétitives. Combiné à une guerre des prix féroce entre les acteurs de la grande distribution, le prix plancher que vous proposez deviendrait rapidement le prix plafond. Ce faisant, l'éviction d'une partie de la production nationale entraînerait une augmentation sensible des importations, portant atteinte à notre souveraineté alimentaire.
C'est pourquoi, au sein de la majorité présidentielle, nous sommes convaincus que l'enjeu n'est pas de définir un prix administré mais de donner les moyens aux agriculteurs de ne pas se voir imposer un prix de vente à perte. La mission que je mène avec Alexis Izard associera les parlementaires à la réflexion autour des propositions qui seront soumises d'ici à l'été. Madame Pochon, nous pouvons travaillons ensemble sur toutes les mesures, au-delà du débat sur le prix – nous vous l'avons d'ailleurs proposé.