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Intervention de Roland Lescure

Séance en hémicycle du jeudi 4 avril 2024 à 15h00
Protéger la population des risques liés aux pfas — Article 2

Roland Lescure, ministre délégué chargé de l'industrie et de l'énergie :

Par cohérence, notre avis est favorable. Lors de la discussion générale, Anne-Cécile Violland a demandé un engagement ferme sur les moyens de financement consacrés à la dépollution ; elle soulevait une question importante et je profite de ma prise de parole pour y répondre.

Pour dépolluer les nappes phréatiques présentant une concentration en Pfas supérieure aux seuils fixés, quelqu'un devra nécessairement payer, et rien ne justifierait que les collectivités territoriales seules s'acquittent de ce financement.

L'article 2 n'apporte pas une réponse satisfaisante à l'enjeu du financement. Plusieurs options s'offrent à nous pour soutenir les investissements prévus par les collectivités afin de dépolluer l'eau potable, la première étant la redevance inscrite dans la proposition de loi. Or cette solution n'est pas opérationnelle, puisqu'elle vise à accompagner la réduction des émissions de Pfas par les industriels eux-mêmes : l'assiette de la redevance étant déterminée par des émissions de Pfas, la diminution de celles-ci réduira mécaniquement le montant de la redevance, jusqu'à tarir les ressources permettant de dépolluer les nappes phréatiques.

L'autre proposition serait de créer une taxe Pfas qui constituerait un impôt de production d'un montant significatif, supporté par les industriels d'aujourd'hui pour financer la dépollution de la production passée, qui n'a d'ailleurs pas toujours de rapport direct avec l'industrie. Certaines zones sont ainsi particulièrement polluées du fait de leur proximité avec des aéroports dans lesquels des mousses anti-incendie ont été utilisées. Alors qu'il ne s'agit donc pas toujours de rejets industriels, une taxe à la production viserait paradoxalement les seuls industriels.

Il reste deux options, que nous sommes prêts à étudier dans le cadre du projet de loi de finances, et que je m'engage à discuter avec vous. La première est de relever le plafond des agences de l'eau, afin de soutenir les investissements des collectivités. Oui, monsieur le rapporteur, c'est un coût pour les consommateurs mais c'est au fond un coût pour la nation qui doit prendre à sa charge la dépollution des activités d'hier – qui à l'époque étaient autorisées. Rappelons-le : les acteurs économiques ont respecté la loi pendant des décennies, il serait trop simple d'en faire les méchants de l'histoire.

La responsabilité collective de réparer les pollutions passées ne peut être portée que par le consommateur, en relevant le plafond des agences de l'eau, ou par le contribuable, en créant une charge budgétaire nouvelle. Certains parlementaires ont ainsi envisagé la création par le PLF d'un fonds Bleu, qui soutiendra les investissements des collectivités sur le modèle du fonds Vert. À ce jour, aucune de ces options n'a fait l'objet d'un arbitrage et nous sommes prêts à en discuter. En attendant, je répète que les propositions qui figurent dans la proposition de loi sont au mieux inefficaces, au pire contre-productives. Avis favorable.

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