Quand on parle d'éducateur spécialisé – et non de moniteur-éducateur ou encore d'éducateur de jeunes enfants, métiers fréquents dans notre secteur –, il faut d'abord se demander de quoi il est spécialiste. La réponse est simple : l'éducateur spécialisé est un spécialiste du lien. Accompagner un enfant, c'est d'abord créer un lien avec lui, être présent auprès de lui lorsqu'il fait un cauchemar la nuit.
Ce métier a tendance à disparaître : les éducateurs spécialisés se forment et remplacent les chefs de service, qui eux-mêmes remplacent les directeurs qui partent à la retraite. Le poste de coordinateur de parcours a été créé pour faire des économies : le coordinateur n'a ni l'autorité ni la rémunération liée au statut de cadre, mais doit agir comme s'il était cadre. Cette fonction existe également pour pallier le manque de cadres – chefs de service et directeurs – formés à la protection de l'enfance.
Il est sécurisant pour un enfant de savoir qu'il y a un adulte sur qui il peut compter ; j'y insiste, car c'est fondamental.
Les travailleurs sociaux sont les éponges de la souffrance humaine. Quand on écoute un enfant nous raconter, à quatre heures du matin, les violences et les viols qu'il a subis, il est difficile de ne pas en être affecté dans sa vie personnelle et de garder espoir. Quand le système est fait pour étouffer ces souffrances, on finit par être brisé. Dans la société que nous sommes en train de construire, les adultes de demain sont déjà détruits.