Jusqu'à septembre dernier, je présidais l'Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires. De grâce, ne dites pas comme partout que l'agro-industrie et la grande distribution font les revenus des agriculteurs, c'est faux ! D'ailleurs, la loi Egalim (loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous) ne change rien à ces revenus puisque les prix agricoles sont européens, voire mondiaux. Ce ne sont pas les industriels ou les acteurs de la distribution qui font les prix, hormis pour certaines filières très courtes comme les fruits et légumes, et encore. Il ne me semble pas qu'il faille chercher de ce côté. Je vous recommande la lecture du rapport que l'Observatoire a présenté en juin dernier et de celui qui viendra en juin prochain.
La malnutrition existe, comme la pauvreté alimentaire : elle résulte non du monde agricole, mais d'une tendance naturelle à des régimes trop marqués en protéines animales et en sucres. Elle est aussi une malnutrition de pauvreté, qui se manifeste dans le champ alimentaire ainsi que dans d'autres domaines. Une sécurité sociale alimentaire aurait-elle du sens par rapport à un revenu minimum d'insertion ? Je n'en suis pas tout à fait sûr.
Enfin, la part agricole de notre caddie alimentaire est de plus en plus faible : elle ne pèse jamais plus de 25 ou 30 %. Le blé ne constitue que 6 à 8 % du prix du pain, au maximum 30 à 40 % de celui des pâtes alimentaires sans œufs ; la matière première laitière représente seulement 10 à 15 % d'un yaourt. Nous consommons des produits de plus en plus transformés, intégrant un nombre croissant de services. Sur une période d'une dizaine d'années, les prix des grands produits de base – le kilo de steak haché, la plaquette de beure, le pain, etc. – sont restés extraordinairement stables. S'ils ont augmenté les deux ou trois dernières années du fait des tensions que les marchés ont connues, ils devraient décroître à nouveau.