Vous avez évoqué, monsieur le rapporteur, les jeunes qui se trouvent en situation de précarité, et votre proposition de loi vient combler un vide juridique. Malheureusement, la réalité déborde très largement le cadre de ce texte. Quelle vision portez-vous pour sortir les jeunes de la précarité en général ?
Aujourd'hui, la moitié des pauvres ont moins de trente ans ; 20 % des jeunes sont en situation de pauvreté, soit trois fois plus que les plus de 65 ans ; la moitié des bénéficiaires des Restos du Cœur ont moins de 30 ans. La pauvreté de la jeunesse s'est donc enkystée dans la société.
Il existe certes une solidarité familiale, que votre proposition de loi vient renforcer. Mais cette forme de solidarité est très injuste. Les 10 % les plus riches versent 8 % de leurs revenus à leurs enfants, ce qui représente plus de 7 000 euros par an. Les 10 % les plus pauvres versent, quant à eux, davantage en proportion de leur revenu, soit 13 %, mais cela ne représente que 1 000 euros par an. Or, avec 100 euros par mois, il n'y a pas de quoi vivre, ni s'émanciper du foyer.
Je pense qu'il y a un saut à faire, à l'exemple de ce qui a été accompli au profit des personnes âgées dans l'après-guerre. Alors que l'on considérait comme naturel que les personnes âgées – quand elles avaient la chance, en milieu populaire, d'arriver jusque-là – vivent aux crochets de leurs enfants ou de la charité, on a changé le système : on est passé d'une solidarité familiale à une solidarité sociale et nationale ; cela a permis de diviser par quatre le taux de pauvreté.
Le même effort doit être fait aujourd'hui pour la jeunesse : nous devons passer d'une solidarité familiale – laquelle existe et continuera d'exister, mais reste très injuste – à une solidarité sociale nationale.