Je salue votre audace, monsieur le ministre. Vous nous présentez un plan de réduction de 10 milliards d'euros des dépenses publiques, parce que vous vous êtes complètement planté dans vos prévisions de croissance. De 1,4 %, les voilà ramenées à moins de 1 %. En 2022, vous déclariez fièrement : « la France est à l'euro près ». En fait, vous êtes à des dizaines de milliards d'euros près – pour vous, c'est une paille.
Pourtant, vous étiez prévenu : l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), le Fonds monétaire international, le président de la commission des finances, la Banque de France, le Haut Conseil des finances publiques (HCFP) : tout le monde vous l'a dit mais vous, vous vous êtes levé un matin fin septembre, vous avez senti le sens du vent avec votre doigt mouillé et vous avez déclaré à l'Assemblée que la croissance atteindrait 1,4 %. Sur l'autoroute du sérieux budgétaire, vous êtes parti en roue arrière – vous voilà écrabouillé contre un platane.
Évidemment, vous n'allez pas soumettre ce bilan catastrophique au débat démocratique. La loi vous impose de faire voter par le Parlement une annulation de crédits supérieure à 1,5 % du budget : vous resterez juste en dessous du seuil. La prochaine fois, envoyez-nous un fax : ça ira plus vite.
Vous avez annoncé que la réduction de 10 milliards n'affecterait que les dépenses de l'État. Sachant que vous n'avez qu'une parole, nous avons été rassurés, même si vous alliez supprimer 500 millions du fonds Vert – sympa pour les territoires –, 750 millions à l'éducation nationale – sympa pour les profs et les familles –, 1 milliard sur MaPrimeRénov' – sympa pour les Français qui vivent dans des passoires thermiques. Vous avez annoncé des économies partout, sauf dans la mission la plus importante, Remboursements et dégrèvements – celle des niches fiscales, avec 140 milliards d'euros de crédits. Pour faire des économies vous grattez jusque dans les pupitres des salles de classe, mais les niches fiscales, c'est comme les scènes de crime : circulez, y'a rien à voir ! Pourquoi ne pas toucher aux niches fiscales ? Vous refusez que l'État devienne une « pompe à fric » : nous voilà rassurés pour les grandes boîtes, arrosées d'argent public.