Merci de me donner l'occasion de vous exposer les avancées réalisées depuis le passage de l'ouragan Irma, avec en particulier la création d'une direction des risques majeurs.
Face aux phénomènes cycloniques, la direction des risques majeurs agit dans plusieurs domaines : la connaissance des phénomènes ; la surveillance, la prévision et l'alerte ; l'information préventive de la population ; la prise en compte des risques dans l'aménagement du territoire ; la réduction de la vulnérabilité, avec son volet d'information de la population ; la préparation et la gestion des crises ; enfin, la gestion des retombées des crises et les retours d'expérience.
Le recensement des aléas s'effectue en partenariat avec des chercheurs. Un rapport de Météo-France retrace l'historique des phénomènes cycloniques depuis le XVIIIe siècle, même si les archives manquent. Depuis les années 1950 et la décision de leur attribuer des prénoms, six tempêtes tropicales et quinze ouragans ont été recensés, dont six entre 1995 et 2000. À l'aune de ces chiffres, il est possible de mesurer la récurrence des phénomènes cycloniques. Ainsi, Saint-Martin est en moyenne confrontée à un phénomène cyclonique tous les quatre à cinq ans, dont un phénomène majeur tous les vingt ans, comme l'illustrent les ouragans Luis, en 1995, et Irma, en 2017.
J'en viens au bilan des dispositifs créés depuis le passage d'Irma, à nos retours d'expérience et aux recommandations émises par les chercheurs et par l'Assemblée nationale et le Sénat, dans leurs rapports.
La collectivité a d'abord mis à jour son plan territorial de sauvegarde. Ce dernier était essentiellement axé sur les ouragans majeurs mais depuis le passage de Tammy en octobre 2023, nous avons compris qu'il était nécessaire d'en décliner une version adaptée aux tempêtes tropicales, car les dispositifs ne sont pas les mêmes.
Nous avons institué un poste de commandement sûr, qui nous avait manqué face à Irma. Nous disposons donc dorénavant d'un lieu autonome en énergie, en eau et en vivres, et doté de téléphones satellitaires pour demeurer joignables même en cas de défaillance des réseaux téléphoniques.
Autre nouveauté, nous avons dressé une carte des enjeux, qui permet au président et aux différents services, en particulier l'armée et la sécurité civile, d'identifier aisément après l'événement les lieux les plus importants – hôpital, port… – et ceux où se trouvent les personnes les plus fragiles.
S'agissant de la protection de la population, il existait des abris cycloniques avant le passage d'Irma, mais qui étaient petits et dispersés. Nous les avons recentrés et disposons désormais de sept abris d'une capacité totale de 1 500 places, contre 371 auparavant. Les collèges évoqués par le président Mussington s'y ajouteront, réduisant la vulnérabilité des populations environnantes.
Mon ancien directeur et moi-même avons développé une nouvelle stratégie d'armement des abris. Dans l'ancien dispositif, ces derniers n'avaient aucun espace de stockage : le matériel nécessaire était stocké dans des containers situés au port et devait être transporté dans chaque abri par les services techniques de la collectivité en amont des phénomènes, ce qui était très contraignant. À présent, chaque abri sera doté d'un container renfermant tout le matériel requis.
Nous avons aussi mis à la disposition des habitants des bus destinés à acheminer vers les abris ceux qui ne peuvent s'y rendre par eux-mêmes.
Nous avons instauré un recensement des personnes vulnérables qui souhaitent rejoindre les abris et leur offrons le transport en ambulance. Avec l'accord du président, nous avons prévu la présence dans les abris d'aides-soignants et d'infirmières, afin d'assurer à ceux qui en ont besoin, souvent des personnes âgées, la poursuite de leurs traitements médicaux.
Dans les retours d'expérience du passage d'Irma, je commencerai par la question de l'eau. Le mémorandum d'entente auquel faisait allusion le président permettrait l'approvisionnement du côté français en eau potable si le fonctionnement de son usine de dessalement venait à s'interrompre. Nous avons également disposé des stocks stratégiques dans les abris : trois palettes d'eau chacun, qui permettent de subvenir aux besoins des personnes qui s'y trouvent pendant quatre-vingt-seize heures.
S'agissant des télécommunications, nous avons assisté après Irma à la propagation de fake news, annonçant notamment un deuxième ouragan dans les quarante-huit heures, ce qui a alimenté un climat d'insécurité et entraîné d'importants mouvements vers l'aéroport. Depuis, la quasi intégralité des réseaux, qu'ils soient électriques ou de télécommunication, ont donc été enfouis.
La collectivité dispose d'un système d'alerte par SMS qui permet, dans l'attente du déploiement de FR-Alert, de communiquer et d'informer la population. Nous avons aussi installé, en collaboration avec la préfecture, des sirènes SAIP (système d'alerte et d'information des populations), permettant d'annoncer les changements de phase pendant l'alerte.
À Saint-Martin, un gros problème de la phase post-événement a été celui du stockage des déchets et du nettoyage des routes, qui étaient jonchées de nombreux débris. Depuis lors, nous avons établi un plan de déblaiement des routes, découpant le territoire en cinq secteurs. Dans chacun, une entreprise de bâtiment et travaux publics (BTP), positionnée avant le phénomène, sortira nettoyer les routes dès le passage en vigilance grise pour permettre la circulation des services de sécurité civile et de secours.
Pour ce qui est de la sensibilisation de la population, le plan territorial de sauvegarde, document destiné à anticiper les risques majeurs et à recenser les moyens dont dispose la collectivité, est communicable à la population et se double d'un plan d'information territoriale sur les risques majeurs. Une déclinaison destinée aux jeunes est en cours d'édition et sera présentée dans les écoles.
Enfin, beaucoup de gens ont voulu venir à l'aide après Irma, sans pouvoir le faire. Nous avons donc créé une réserve territoriale de sécurité civile pour permettre à ceux qui le veulent de venir en aide à la population en situation de post-événement.