La Pirac est le bureau de la Croix-Rouge française spécialisé dans la gestion des risques de catastrophes. Nous sommes basés en Guadeloupe. Notre équipe sur place compte une trentaine de personnes. Ce bureau existe depuis 2018, avec le mandat de travailler sur la gestion des risques de catastrophes, sur le plan de la prévention, de la préparation et de la réponse, sur une aire géographique qui correspond d'une manière générale à celui de la Grande Caraïbe, même si les projets les plus importants concernent plutôt les Petites Antilles.
Nous n'opérons pas de distinction, en termes de priorités ou de projets, entre pays étrangers et territoires français. Nous avons pour mandat de mener à bien ces types de projets sur les deux types d'entités que sont les territoires français (les quatre territoires des Antilles et la Guyane) et l'ensemble des petites îles des Antilles, qui correspondent d'une manière générale aux territoires intégrés à l'OECO.
La première thématique sur laquelle nous travaillons se rapporte à la prévention et à la réduction des risques de catastrophes. Nous travaillons depuis plusieurs années sur cet aspect, avec des projets ici en Guadeloupe ou en lien avec nos collègues en Martinique. Grâce à l'AFD, nous allons pouvoir mener à partir de cette année un programme de sensibilisation à la culture du risque dans les écoles, en Dominique et en République dominicaine.
La culture du risque est un sujet important pour nous. Nous œuvrons à la création d'outils ludiques pour que cette culture soit véritablement intégrée, auprès des enfants en particulier. Nous effectuons aussi de la sensibilisation auprès du grand public, mais il est vrai que nous mettons l'accent sur les enfants, puisque l'on sait que le changement de comportement est quand même plus efficace lorsqu'on travaille auprès des publics scolaires. Nous avons donc développé des outils ludiques, que nous essayons de mettre à la disposition d'un maximum d'écoles, majoritairement en Guadeloupe pour l'heure, mais bientôt aussi sur les deux territoires que j'ai cités et à terme, je l'espère, sur les quatre territoires des Antilles.
La problématique que nous rencontrons sur ce sujet concerne évidemment toujours l'accès aux financements. Autant l'accès aux financements est relativement simple sur le plan international – je pense à l'AFD, encore une fois, et à Interreg Caraïbes, notre partenaire privilégié, qui fonctionne d'ailleurs souvent en cofinancement avec l'AFD –, autant la démarche est plus complexe sur le territoire français. Il n'y a effectivement pas de guichet spécifique ; nous ne sommes pas éligibles aux financements de l'AFD sur le territoire français.
Les collectivités (région ou département de la Guadeloupe, collectivité territoriale de Martinique…) peuvent proposer des financements, tout comme la direction de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DEAL) peut être un partenaire financier en Guadeloupe, mais ces financements restent modestes au regard des besoins et nécessitent de démultiplier les démarches. Ces dernières sont plus simples lorsque nous pouvons nous appuyer sur des financements importants et structurants comme ceux que nous pouvons obtenir auprès d'Interreg Caraïbes ou de l'AFD.
Outre la prévention, nous travaillons sur le volet relatif à la préparation, qui renvoie aux efforts pour se préparer à répondre aux catastrophes naturelles. Sur cet aspect, nous travaillons notamment avec les Croix-Rouge des différents territoires – dont nos collègues de la Croix-Rouge française sur les territoires français. Nous les accompagnons dans la préparation de la réponse aux catastrophes naturelles, en construisant des entrepôts de biens de première nécessité à distribuer, en formant les équipes en logistique…
Dans ce cadre, l'équipe locale de la Croix-Rouge du territoire sera le premier acteur de la réponse. Pour notre part, nous intervenons en appui au niveau régional, si nécessaire, en envoyant du matériel, des équipes ou encore des unités de production d'eau potable, comme lors de l'épisode Fiona en 2022. Dans un contexte multi-insulaire, nous avons besoin d'une équipe de la Croix-Rouge formée, avec un entrepôt de biens de première nécessité à distribuer et des moyens roulants. Nous nous attachons à accompagner et à former ces équipes locales, aussi bien de la Croix-Rouge française que des autres sociétés nationales.
Un autre enjeu réside dans notre propre capacité de réponse, lorsque le niveau de la catastrophe nous impose de nous positionner en appui, ou si les ressources de l'équipe locale sont dépassées, selon leur niveau de préparation. À cette fin, nous disposons de stocks prépositionnés en Guadeloupe et en Martinique ; nous construisons aussi actuellement un important entrepôt régional, pour quadrupler notre capacité de stockage. La construction de cet entrepôt, dans l'enceinte de l'aéroport de Pointe-à-Pitre, a débuté, pour une livraison prévisionnelle en mars 2025. Il permettra de se préparer à des catastrophes d'une ampleur plus importante, dans le contexte du changement climatique.
En termes de coopération, la CDEMA constitue l'acteur de référence opérationnel dans la réponse. Nos programmes sur place sont systématiquement en collaboration, au niveau régional, avec l'OECO, le partenaire plus politique de la coopération régionale des Petites Antilles, et avec la CDEMA, partenaire opérationnel au niveau plus large des Caraïbes. Ces partenariats nous permettent évidemment d'avoir accès plus facilement aux ressources de ces partenaires et aux différents pays de la région.
Nous menons une large activité avec ces partenaires. L'une des plus-values de la présence sur place de notre bureau réside dans la possibilité de favoriser des échanges entre le monde français et le monde anglophone, en particulier des Petites Antilles, mondes qui ont parfois quelques difficultés à interagir.
Quelles que soient les activités, nous invitons des acteurs des Antilles françaises et des acteurs de la région, dans le cadre d'événements bilingues. Nous avons par exemple organisé l'an passé un webinaire sur l'amélioration de la législation relative à la réponse aux catastrophes naturelles. Le discours d'ouverture a été proposé par le secrétaire de la CDEMA, et nous avions invité de nombreux représentants des sociétés nationales, des ministères ou des agences de réponse aux catastrophes des différentes îles, ainsi que nos collègues français.
Nous nous efforçons d'inclure au maximum ces deux mondes, en particulier lors de rencontres en présentiel, dans le cadre de formations, en Guadeloupe ou ailleurs. Nous avons par exemple proposé une importante formation à Saint-Martin sur le thème de la réponse aux catastrophes, en présence de la CDEMA et d'acteurs français.
Enfin, s'agissant de la collaboration dans la réponse, je citerai l'Emiza et les forces armées aux Antilles, avec lesquels nous entretenons de très bons rapports. Le nouvel amiral qui a pris ses fonctions il y a quelques mois est venu nous rencontrer au bureau. La collaboration avec les forces armées est essentielle. Si nous disposons effectivement de biens à distribuer, nous n'avons pas les vecteurs, tandis que les forces armées, à l'inverse, peuvent mobiliser des vecteurs, mais n'ont que peu de biens à distribuer. Nous sommes donc complémentaires, et nous avons appris à bien travailler ensemble dans le cadre des opérations que nous avons pu mener ces dernières années.
Pour revenir sur Interreg Caraïbes, son mandat porte véritablement sur la coopération régionale, avec une ligne importante sur l'adaptation au changement climatique et la réponse aux catastrophes naturelles. C'est donc pour nous un bailleur de référence. Comme Interreg Caraïbes ne finance pas ces projets en intégralité, l'accompagnement financier de l'AFD est vraiment important et nous permet de faire plus sur des aspects ciblés sur certains pays, que j'ai cités dans la première partie de mon intervention.