Intervention de Alma Dufour

Séance en hémicycle du jeudi 14 mars 2024 à 9h00
Réduction de l'impact environnemental de l'industrie textile — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlma Dufour :

Au Bangladesh, les émeutes des ouvriers du textile ont déjà fait plusieurs morts, dans le silence assourdissant des grands médias. Voyez-vous, on préfère lancer des polémiques sur les crop tops ou les abayas plutôt que sur ceux qui les fabriquent. Ces gens qui n'existent pas dans les publicités vantant la liberté acquise au prix de leur esclavage ou le confort trouvé au prix de leur souffrance, ces gens qui fabriquent une grande partie des vêtements que nous portons, nos esclaves des temps modernes, ont contredit l'atroce préjugé qui voudrait que l'on puisse exploiter la misère humaine à l'infini sans que les gens se révoltent.

Au Bangladesh, les salaires sont de 2 dollars par jour, à peine de quoi permettre aux ouvriers de survivre pour reprendre le travail le lendemain. Au rythme où les rémunérations évoluent dans le textile, il faudra à ces ouvriers quarante ans pour gagner le minimum vital. Il y aura toujours un pays plus pauvre où délocaliser, et l'industrie ne recule devant rien, pas même devant le travail forcé en Ouzbékistan ou dans les camps de Ouïghours en Chine.

Dans la course effrénée à la baisse des coûts de production, les travailleurs du Sud sont perdants, les salariés et les chômeurs européens sont perdants : seules gagnent les multinationales, entrées dans une spirale d'enrichissement sans fin, qui nous emportera tous. Misère sociale et chaos climatique sont les deux faces de la même pièce. Le textile émet jusqu'à 10 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. La France importe chaque année cinquante vêtements par habitant. II n'y a pas de surconsommation sans surproduction ; il n'y a pas de surproduction si on ne fait pas bosser des gosses dans des usines.

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