Ce site présente les travaux des députés de la précédente législature.
NosDéputés.fr reviendra d'ici quelques mois avec une nouvelle version pour les députés élus en 2024.

Intervention de Albin Soarès-Couto

Réunion du jeudi 15 février 2024 à 11h00
Commission d'enquête sur l'attribution, le contenu et le contrôle des autorisations de services de télévision à caractère national sur la télévision numérique terrestre

Albin Soarès-Couto, directeur des publics, du pluralisme et de la cohésion sociale de l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) :

Le modèle économique des chaînes gratuites de la TNT repose essentiellement sur la publicité : en 2022, les chaînes privées gratuites tiraient environ 94 % de leur chiffre d'affaires de cette publicité. La télévision linéaire conserve une forte attractivité auprès des annonceurs en raison de l'audience massive à laquelle elle donne accès et de la portée instantanée des campagnes diffusées.

Toutefois, au fil des années, la durée d'écoute individuelle diminue tendanciellement : elle s'établissait à 206 minutes en moyenne en 2022 contre 230 minutes en 2012. Par conséquent, les recettes nettes de la publicité, qui ont connu un taux de croissance annuel moyen faible (+0,5 % entre 2012 et 2022) se sont deux érodées en 2022, avec des recettes nettes totales d'environ 3,5 milliards d'euros, soit une diminution de 1,5 % par rapport à 2021. Selon l'étude réalisée par PMP Strategy pour l'Arcom et la direction générale des médias et des industries culturelles (DGMIC) intitulée Évolution du marché de la communication et impact sur le financement des médias par la publicité, publiée le 30 janvier dernier, cette tendance devrait se poursuivre et s'amplifier dans les prochaines années, en lien avec une évolution anticipée des usages défavorables à la télévision linéaire. Les recettes nettes de la télévision pourraient alors atteindre 3,1 milliards d'euros à l'horizon 2030.

En parallèle, les chaînes de télévision ont entamé depuis plusieurs années leur transition numérique par la monétisation de leurs inventaires publicitaires numériques et par la mise en œuvre d'offres de publicité segmentée. En 2022, la publicité télévisée segmentée représentait moins de 1 % du total des recettes publicitaires nettes de télévision, contre 7 % pour les espaces publicitaires numériques. En conclusion sur ce premier propos, les chaînes nationales privées gratuites sont très fortement dépendantes du marché publicitaire. Si l'attractivité de la télévision linéaire comme support publicitaire n'est plus à démontrer, celle-ci tend à décliner et pourrait créer à terme des tensions sur le modèle économique des éditeurs de télévision et donc sur le financement de l'information et de la création.

En second lieu, la réglementation applicable aux communications commerciales a vocation, en grande partie, à protéger les téléspectateurs consommateurs en encadrant le contenu des messages publicitaires, notamment avec un ensemble de règles déontologiques et les modalités d'insertion de cette publicité. Est également prévue l'exclusion totale ou partielle des écrans publicitaires de plusieurs secteurs économiques, afin de défendre les intérêts sectoriels. Ce cadre juridique repose sur les dispositions de l'article 14 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication.

Il confie à l'Arcom une mission de contrôle sur l'objet, le contenu et les modalités de programmation des messages publicitaires diffusés sur les antennes. Ce contrôle s'exerce, comme pour le reste des programmes, après diffusion et jamais a priori. Les services de communication audiovisuels sont tenus au respect de règles générales qui sont donc issues de la loi et de ses décrets d'application encadrant tant la publicité, le parrainage que le téléachat.

En matière télévisuelle, le décret du 27 mars 1992 fixant les principes généraux définissant les obligations des éditeurs de services en matière de publicité, de parrainage et de télé-achat, est complété par les conventions des éditeurs privés et par le cahier des charges de France Télévisions. L'article 14-1 de la loi du 30 septembre 1986 est venu ajouter une quatrième catégorie juridique de communications commerciales audiovisuelles : le placement de produits. Le législateur a confié à l'Arcom le soin de veiller aux conditions dans lesquelles les programmes des services de communication audiovisuels peuvent comporter de tels placements de produits. A cet égard, l'Arcom a effectué un certain nombre de préconisations dans une délibération du 16 février 2010.

Concrètement l'Arcom intervient lorsqu'elle constate la programmation de messages contestables sur le plan déontologique. Elle est par ailleurs particulièrement attentive aux modalités d'identification et d'insertion des écrans publicitaires dans les programmes. Elle s'assure que les diffuseurs respectent les règles relatives à l'interruption des œuvres cinématographiques, audiovisuelles et de tout type de programme. Elle contrôle le temps d'antenne consacré à la programmation des messages publicitaires et intervient auprès des chaînes en cas de dépassement de la durée maximale de publicité autorisée. Le motif d'intervention le plus fréquent de l'Arcom concerne la publicité clandestine.

En complément de ce cadre juridique, il existe aussi quelques mécanismes d'engagement volontaire souhaités par le législateur afin de répondre à des impératifs de politique publique. L'Arcom est appelée à être le promoteur de ceux-ci, tels que la charte alimentaire et les contrats climat.

En conclusion, il est évidemment important de signaler que les deux consultations publiques lancées récemment par la DGMIC seront à suivre avec grand intérêt. Pour le collège de l'Autorité, l'un des enjeux majeurs consiste à réduire les asymétries des règles applicables d'une part aux médias audiovisuels, et d'autre part aux médias numériques. L'enjeu est double : consolider évidemment le modèle économique des opérateurs audiovisuels et renforcer la protection des consommateurs sur les services en ligne.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.