Je souhaite tout d'abord revenir sur la question des retards des politiques publiques, mise en lumière à l'occasion de la publication de ce 5e PNGMDR. Il est incroyable qu'un exécutif soit engagé formellement sur la production et la validation d'un plan et ne remplisse pas cette mission, que le gouvernement retarde sciemment la publication d'un rapport que la loi exige. Cette situation est, pour nous parlementaires, frustrante et froissante. Elle témoigne d'un non-respect du Parlement. Nous sommes nous-mêmes soumis à diverses obligations, que nous essayons d'honorer. Je vois dans cette situation un dysfonctionnement de notre démocratie. La programmation pluriannuelle de l'énergie a elle aussi d'ores et déjà plus d'un an de retard. Or nous savons tous combien ces éléments conditionnent des choix nationaux et locaux sur la production d'énergies renouvelables ou l'installation de nouveaux réacteurs.
À l'échelle des 25 dernières années, les politiques publiques ont jeté l'opprobre sur le nucléaire. Or on s'étonne aujourd'hui que les décisions relatives au démantèlement des installations, à l'enfouissement et à la gestion des déchets ou au choix des réacteurs n'aient pas été prises et que les travaux de recherche et développement sur les réacteurs à neutrons rapides n'aient pas été menés ou aient été stoppés pour des considérations qui au mieux m'échappent, au pire ne me satisfont pas. Les déchets sont extrêmement liés au choix des réacteurs. Or nous entendons un plaidoyer en faveur du choix des réacteurs à neutrons rapides, qui a pourtant été écarté. Les rapports de la CNE2 ont raison de pointer que ces réacteurs seraient la solution en 2024 si la décision avait été prise longtemps en amont, lorsque la France était leader en la matière et possédait les moyens de mettre en place une série de réacteurs à neutrons rapides. Je suis persuadé que si cela avait été fait, nous n'aurions pas ces discussions 25 ou 30 ans plus tard.
L'électrification de notre société est également un choix de politique publique, une orientation nationale, voire internationale, qui requiert l'utilisation de terres rares – j'ai entendu qu'elle produit des déchets radifères. Ces terres rares sont présentes dans nos smartphones, les éoliennes, etc. Je pense que cet aspect, qui constitue pour l'instant un angle mort du rapport, pourrait y être mis en relief.
Les comparaisons avec les autres pays sont intéressantes. Les États-Unis ont par exemple une approche des questions de stockage et de gestion des déchets radioactifs très différente de la nôtre : l'enfouissement n'y est pas un problème, dans la mesure où ils disposent de grands espaces désertiques éloignés de toute habitation.
Je m'interroge enfin sur les mesures de radioactivité. Vous avez parlé, M. Chareyron, de « mesures officielles », ce qui laisse entendre qu'il en existerait d'autres. Cela m'interroge. Le fait qu'une structure comme Orano puisse être accusée de ne pas produire des mesures vérifiables, certifiées, correspondant à la réalité des faits, pose un réel problème, en termes non seulement de déontologie, mais aussi de santé publique. Avez-vous engagé des poursuites contre Orano après avoir effectué vos propres mesures ? Vos instruments de mesure bénéficient-ils, comme ceux utilisés par les organes officiels, d'une certification ?