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Intervention de Emmanuelle Mauger

Réunion du jeudi 8 février 2024 à 14h00
Commission d'enquête sur l'attribution, le contenu et le contrôle des autorisations de services de télévision à caractère national sur la télévision numérique terrestre

Emmanuelle Mauger, déléguée générale adjointe du Syndicat des producteurs indépendants (SPI) :

Le SPI représente plus de 500 entreprises de production sur l'ensemble du territoire hexagonal et ultramarin. Nos adhérents travaillent avec tous les écosystèmes locaux et nationaux, et pour tous les diffuseurs (privés ou publics, payants ou gratuits). Au cinéma, ils rencontrent de nombreux succès et obtiennent des prix : la Palme d'or au dernier Festival de Cannes, l'Ours d'or et l'Ours d'argent au Festival de Berlin l'année dernière ou encore le grand prix du documentaire international et le grand prix du documentaire national au Festival international du film documentaire le mois dernier.

Nos adhérents sont des PME et TPE. Ils travaillent principalement avec les diffuseurs historiques. Les investissements des SMAD sont devenus très importants, car ils apportent une bouffée d'air au secteur. D'après les dernières études de l'Arcom, publiées en 2022, ces investissements atteignent 345 millions d'euros pour les secteurs de l'audiovisuel et du cinéma.

Toutefois, il faut savoir que ces investissements ont profité à 81 œuvres, dont 53 œuvres audiovisuelles (comprenant 27 séries de fiction) et 28 œuvres cinématographiques seulement. Ces chiffres sont à comparer aux plus de 5 000 heures de films aidées par le Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC) et produites chaque année, qui représentent plus de 250 films. En résumé, la source de croissance de la filière alimente en réalité une très faible partie de notre écosystème professionnel. Pourtant, cet écosystème jouit d'une excellente reconnaissance dans le monde entier, et nos œuvres sont couronnées par de nombreux succès.

Le financement de l'audiovisuel public est une préoccupation majeure de notre filière. Nous tenons à remercier MM. Jean-Jacques Gaultier et Quentin Bataillon pour leur rapport en conclusion des travaux de leur mission d'information sur l'avenir de l'audiovisuel public publié le 7 juin et leur proposition de modification de la loi organique, que nous soutenons très fermement. Nous espérons vivement que cette proposition de loi sera remise sur le métier, car elle est essentielle pour pérenniser le financement de l'audiovisuel public.

À mon sens, notre écosystème se caractérise par un degré de maturité inégalé, en Europe et même au niveau mondial. L'articulation entre le cadre législatif, le cadre réglementaire et la négociation interprofessionnelle est effectivement très équilibrée. Ces différentes réglementations et législations se combinent et se rencontrent au sein de l'Arcom, au travers des conventions négociées par l'Autorité avec les éditeurs de services, qui tiennent compte des relations professionnelles. Ce mode de fonctionnement est sans équivalent en Europe et dans le monde. J'en suis d'autant plus convaincue que je siège au conseil d'administration de la Coordination européenne des producteurs indépendants. Nos homologues italiens, portugais, scandinaves, irlandais ou polonais nous confient volontiers que la France est un modèle pour eux.

Nous nous efforçons d'étendre cette dynamique vertueuse en Europe, et nous sommes ravis de constater que nos voisins allemands viennent s'inscrire dans ce mouvement. En 2023, pour la première fois l'Allemagne a décidé d'instaurer un dispositif d'obligation d'investissement des SMAD et des diffuseurs dans la production européenne et allemande. Jusqu'à présent, la Constitution allemande interdisait une telle mesure. À force d'échanges franco-allemands et de coopération, l'Allemagne a compris que pour préserver la diversité culturelle en Europe et les actifs stratégiques culturels, une régulation de l'investissement des SMAD était inévitable. C'est un véritable tournant dans la position allemande.

Nous tenons à maintenir l'articulation intelligente que nous sommes parvenus à construire pour concilier les besoins contractuels et adapter la régulation aux pratiques du marché.

Votre questionnaire nous interroge sur la longueur et la lourdeur de nos négociations interprofessionnelles. Je répondrai que ces négociations ne sont pas interminables, puisque nous avons pu négocier rapidement des accords interprofessionnels dans l'audiovisuel et le cinéma, y compris avec Netflix. D'ailleurs, la France est à ma connaissance le premier pays au monde à avoir conclu un accord avec Netflix à la fois dans le cinéma et l'audiovisuel. Nous avons aussi signé des accords avec Amazon, Orange, Altice, TF1, M6, France Télévisions et Canal+.

Nous sommes donc en mesure de négocier très rapidement et d'adapter les accords existants au moyen d'avenants pour tenir compte des évolutions de marché.

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