Intervention de Sylvie Colas

Séance en hémicycle du mercredi 28 février 2024 à 21h30
Mieux partager la valeur et garantir des revenus dignes pour les agriculteurs

Sylvie Colas, secrétaire nationale de la Confédération paysanne :

Les grands projets photovoltaïques sur des sols agricoles – je ne parle pas de la couverture des toitures – vont conduire à mettre en concurrence la terre nourricière et la terre productrice d'énergie. Une grande inquiétude nous a saisis en découvrant les propositions du Gouvernement dans son projet de loi d'orientation et d'avenir agricoles. La notion de souveraineté énergétique y côtoie celle de souveraineté agricole, ce qui nous a beaucoup choqués car la souveraineté agricole figure, à l'origine, dans le code rural et correspond aux valeurs que nous portons avec le mouvement paysan international de la Via Campesina. La concurrence dans l'usage de la terre entraîne une course au foncier aux effets terribles. Des sociétés nous proposent régulièrement de louer nos terres à des loyers si élevés que nous pourrions en conclure que nous n'avons plus besoin de travailler la terre et qu'il suffirait de la louer pour qu'elle soit gérée comme un parc photovoltaïque.

Ce phénomène constitue une véritable inquiétude, car il va faire monter la valeur du foncier et empêcher des jeunes agriculteurs de s'installer. D'aucuns prétendent que s'y opposer priverait les agriculteurs d'une source de revenu intéressante. Peut-être, mais n'oublions pas que les projets photovoltaïques sont largement accompagnés financièrement par l'État, qui fixe un prix de rachat de l'électricité : ces montages financiers profitent toujours aux mêmes et l'agriculteur, souvent mal informé, n'est pas le plus gagnant à long terme.

En outre, il faut absolument préserver la nature des sols. À cet égard, les systèmes qualifiés d'agrivoltaïques sous prétexte qu'on met quatre moutons sous des panneaux solaires, alors que nous sommes en pleine négociation avec le Mercosur et que la filière ovine est en grande difficulté financière, sont des artifices : on ne comprend pas bien où ira cette production d'électricité, ni à quel prix, en la développant ainsi. Il s'agit, une fois de plus, de détourner notre profession vers un autre usage, à coups de financement. Nous sommes très inquiets pour la biodiversité et la protection de nos sols, de notre environnement et de nos paysages. Je vis dans une région rurale assez touristique et ces projets y sont très mal accueillis.

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