Je vous remercie pour vos interventions respectives et je suis heureuse que vous, les agriculteurs et les organisations paysannes, ayez enfin la parole à l'Assemblée nationale. D'autres acteurs, ceux de l'industrie agroalimentaire et de la distribution, pourtant essentiels à ce débat sur le partage de la valeur agricole organisé par le groupe Écologiste – NUPES, ont décliné l'invitation : Lactalis, Danone, Leclerc, Sodiaal, l'Association nationale des industries alimentaires (Ania), Nestlé et Groupe Avril. Pourquoi un tel refus ? Sans doute le mépris envers notre Assemblée et la gêne de se retrouver face à vous.
Entre le dernier trimestre 2021 et le deuxième trimestre 2023, le taux de marge des industries agroalimentaires est passé de 28 % à 48,5 %, soit une augmentation de 71 % du taux de marge en un an et demi. En un an, les profits du secteur de l'industrie agroalimentaire ont augmenté de 132 %, passant de 3 à 7 milliards d'euros. La fortune du PDG de Lactalis s'élève désormais à 22 milliards de dollars.
Vous l'avez dit, pendant ce temps-là, malgré la hausse de la productivité, le revenu net de la branche agricole a baissé de près de 40 % en France, en euros constants. Dans ce contexte, il est inacceptable de maintenir un système dans lequel le coût de la transition repose majoritairement sur les épaules des agriculteurs. Nous ne pouvons pas leur demander à la fois de produire à très bas coût et de supporter les coûts et les risques associés aux changements de pratiques, alors que le contexte du dérèglement climatique accroît encore l'incertitude. La société tout entière bénéficie des productions agricoles françaises, qui dessinent nos paysages, du rôle des agriculteurs nombreux qui font vivre nos villages, de la réduction des pesticides et de la préservation de la biodiversité.
Ma question s'adresse à M. Uthayakumar de la Fondation pour la nature et l'homme. Dans votre dernier rapport sur le partage de la valeur dans la filière laitière, vous proposez la création d'un fonds mutualisé de transition agroécologique, qui serait abondé en pourcentage des bénéfices et des dividendes des acteurs de la transformation et de la distribution. Comment la construction de ce fonds répondrait-elle à la fois aux inégalités dans le partage de la valeur, notamment au profit des agriculteurs, mais aussi aux défis de la transition écologique à venir ?