J'ai grand plaisir à venir évoquer devant vous l'action de mon ministère. Je souhaite en préambule souligner le travail effectué par mes prédécesseurs, notamment Mme Catherine Colonna, en lien avec la première ministre Élisabeth Borne, dont je salue la présence dans votre commission aujourd'hui. J'hérite d'un ministère transformé et renforcé, qui a su prendre le tournant d'un monde au bord de la rupture.
Face aux grandes crises que vous avez mentionnées, nos concitoyens attendent beaucoup de nous : ils veulent être protégés, défendus, vivre en paix ; ils veulent que leur pays continue à compter sur la scène internationale. Les actions et implications de la diplomatie française à l'échelle internationale ont des conséquences directes et indirectes dans leur quotidien, qu'il s'agisse du prix de l'énergie ou de la capacité à réagir face à d'éventuelles pandémies.
Mon ministère peut s'appuyer, pour remplir ses missions, sur une augmentation inédite de ses moyens, avec une hausse de ses effectifs et l'allocation de crédits supplémentaires visant notamment au renforcement des activités consulaires et des outils de communication. Je remercie très sincèrement le Parlement, et notamment cette commission pour votre soutien et votre engagement sur le sujet. Il s'agit d'un signal fort envoyé à nos agents comme à l'ensemble des Français. Soyez assurés que je veillerai à la bonne gestion de ces financements, dans le cadre des actions prioritaires entreprises face aux différentes situations que vous évoquiez.
L'état du monde impose une certaine gravité. Les crises se multiplient, se complexifient et tendent à s'inscrire dans la durée. Nos efforts diplomatiques se déploient aux quatre coins du globe, selon des modalités différentes en fonction des enjeux, mais avec l'objectif constant de former des coalitions, de trouver des solutions et de favoriser la désescalade. Telle est la mission que m'a assignée le président de la République en me confiant ces responsabilités.
Force est de constater que certains États misent sur l'instabilité et se saisissent de ces crises, voire les provoquent, de manière opportuniste et cynique. Face à cela, la diplomatie française agit avec détermination et sans aucune naïveté, pour que le monde conserve ses règles, ses repères et ses principes.
Ce ministère a également vocation à prendre à bras-le-corps les enjeux globaux, dont les négociations relatives au climat. Nous sommes ainsi tout à fait disposés à lancer avec vous des réflexions sur ces sujets.
Face à ces crises, la France agit, en combinant la dimension humanitaire, la recherche de stabilité et le développement, dans une logique alliant prévention, réaction et construction. Notre pays figure ainsi parmi les premiers bailleurs dans le domaine humanitaire, avec l'objectif que nos aides atteignent 1 milliard d'euros d'ici 2025. Nous portons notamment secours aux populations civiles à Gaza, avec 100 millions d'euros additionnels et plus de 1 000 tonnes de fret. Nous apportons également notre soutien aux Ukrainiens qui souffrent chaque jour des conséquences de l'agression russe, avec un apport de 300 millions d'euros d'aide civile, adressés aux organisations non gouvernementales (ONG), aux organisations internationales et aux opérateurs de la société civile. Nous avons également porté secours aux Arméniennes et aux Arméniens contraints de fuir leurs foyers.
En septembre 2023, le président de la République a rassemblé les forces politiques de la nation aux rencontres de Saint-Denis, auxquelles j'ai eu la chance de participer en tant que responsable de parti politique. Les questions internationales avaient alors occupé une place considérable dans les échanges. Des précisions avaient notamment été demandées sur la position de la France par rapport à l'Ukraine ou sur le renouvellement des partenariats avec les pays africains. Nous avions aussi débattu de l'ensemble des sujets internationaux avec Catherine Colonna, dans le but notamment de mieux inclure le Parlement dans nos discussions ; deux débats au titre de l'article 50-1 de la Constitution ont notamment été organisés. Nous voulons aller plus loin et nous serons ravis, si vous nous sollicitez, de poursuivre ces échanges.
Notre détermination à agir face aux différentes crises est totale. L'ensemble de notre réseau reste ainsi pleinement mobilisé sur la question ukrainienne, qui est l'une de mes priorités. Je salue en particulier les agents de notre poste diplomatique de Kiev, qui effectuent un travail remarquable dans un contexte extrêmement difficile. En défendant l'Ukraine, nous défendons aussi les intérêts et la stabilité du continent européen et de la France. L'année 2024 sera déterminante pour l'issue de cette guerre.
La Russie cherche à nous persuader que sa victoire est inéluctable et que l'Ukraine a déjà perdu. C'est faux. L'armée ukrainienne est en effet déjà parvenue à reprendre près de la moitié du territoire précédemment conquis par les troupes russes. Elle a en outre remporté des succès marquants, notamment en Crimée et près de la mer Noire, en sécurisant un corridor maritime crucial pour les exportations et l'équilibre alimentaire du monde. Enfin, depuis le début de l'hiver, l'armée russe s'épuise en offensives coûteuses en hommes et en matériels, pour des gains très limités. La Russie ment également lorsqu'elle évoque l'épuisement de notre volonté à soutenir l'Ukraine.
La France déploie beaucoup d'énergie dans ce domaine sur la scène européenne, même si nous ne soulignons sans doute pas suffisamment le soutien européen et notre capacité à obtenir des succès. Les 50 milliards d'euros alloués à l'Ukraine lors du dernier Conseil européen constituent un signal fort envoyé aux États-Unis, qui tardent à contribuer à cet effort.
En matière d'aide militaire, le président de la République a récemment fait des annonces majeures. Cela concerne l'envoi de missiles de croisière SCALP – système de croisière conventionnel autonome à longue portée – et de bombes guidées AASM – armement air-sol modulaire –, qui permettront à l'armée ukrainienne de défendre son territoire en frappant en profondeur. Nous devons également mobiliser la base industrielle et technologique de défense (BITD) européenne au bénéfice de l'Ukraine et continuer à miser sur le collectif européen pour apporter une aide militaire. Le chemin est encore long.
La communauté internationale doit en outre tout faire pour empêcher le contournement des sanctions prises contre la Russie, dont je suis persuadé qu'elles sont efficaces, même si elles restent perfectibles. Nous disposons de données en ce sens, que nous rendrons probablement publiques.
L'Europe agit, donc. Nous avons la volonté de continuer à soutenir l'Ukraine dans la durée.
Concernant la situation au Proche-Orient, il faut savoir que cent trente-quatre personnes, dont trois Français, sont toujours retenues en otage. La nation a rendu, la semaine dernière, un poignant hommage à nos concitoyens morts lors des attaques du 7 octobre 2023, dont le président de la République a rappelé qu'il s'agissait du pire massacre antisémite de notre siècle. Nous continuerons à refuser l'antisémitisme sous toutes ses formes.
Nous observons par ailleurs l'intensification des bombardements israéliens et l'avancée de l'armée vers Rafah, ville de 300 000 habitants en temps normal où sont actuellement massés 1,5 million de civils gazaouis. Les conditions de vie y sont déplorables. J'ai eu l'occasion de qualifier l'avancée des troupes israéliennes d'« injustifiable », terme qui montre l'ampleur de notre indignation.
Nous savons en outre que les foyers de crise se multiplient autour de Gaza et que les tensions restent vives au Sud du Liban, notamment.
Dans ce contexte, la France agit sans relâche ; nous passons des messages aux pays arabes, à Israël et au Liban. Notre diplomatie est entendue et son positionnement est compris par l'ensemble des parties. Sa voix compte parce qu'elle agit face à l'urgence du moment, parce qu'elle cherche des solutions pour l'avenir, visant à assurer la sécurité pour tous et à éradiquer le terrorisme. Nous estimons qu'un cessez-le-feu à Gaza est indispensable. Nous y travaillons avec l'ensemble de nos partenaires, en participant à tous les formats diplomatiques proposés, afin de contribuer à trouver une solution politique.
Nous sommes aussi mobilisés sur le plan humanitaire, je l'ai dit. Nous avons ainsi soigné des blessés sur le bâtiment de la marine nationale Dixmude et évacué des enfants vers la France, afin qu'ils soient pris en charge dans nos hôpitaux.
Nous poursuivons par ailleurs notre engagement en faveur de la paix et contre le terrorisme, en mobilisant nos partenaires pour sanctionner le Hamas. L'existence d'un État palestinien viable et reconnu dans ses frontières, avec une Autorité palestinienne revivifiée, est une condition de la paix. J'ai eu l'occasion de m'entretenir avec Mahmoud Abbas et d'exposer à Benyamin Netanyahou la position de la France sur ces questions. La plupart des dirigeants de la région convergent vers cette solution à deux États. La difficulté, aujourd'hui, est d'en convaincre le gouvernement israélien.
Je souhaite par ailleurs évoquer notre partenariat avec les pays africains. Le continent africain comptera de plus en plus dans les grands équilibres de notre monde. La France doit être au rendez-vous et s'affirmer comme un partenaire fiable et crédible. Elle dispose pour cela de nombreux atouts, parmi lesquels l'inventivité de ses entreprises, l'attractivité de ses universités et son excellence dans les domaines industriel, culturel et créatif. Nous intervenons en Afrique en appui des organisations régionales, afin de faciliter les sorties de crise.
Nous portons notamment des messages dans la région des Grands Lacs, auprès du Rwanda et de la République démocratique du Congo, afin de favoriser la désescalade et de trouver des solutions durables au conflit. Nous accueillerons par ailleurs à Paris, le 15 avril 2024, une conférence humanitaire pour le Soudan et les pays voisins, afin d'essayer de résoudre les crises humanitaires dramatiques qui sévissent dans cette zone.
Notre partenariat se renouvelle, en s'appuyant sur les liens qui unissent notre société aux sociétés africaines. Je pense notamment aux jeunes, aux artistes et aux entrepreneurs.
Nous avons par ailleurs des rendez-vous communs au Parlement, puisqu'il y aura une loi sur la restitution des biens culturels.
Nous voulons approfondir notre relation avec les pays africains, sur la base d'un partenariat respectueux, d'égal à égal, tourné vers l'avenir.
Notre diplomatie est également engagée pour la planète, puisque l'état du monde dépend de celui du climat et des ressources. Je m'attacherai donc à mener une politique étrangère climatique, dans le cadre notamment des deux conférences des parties (COP) à venir. L'action de la France restera déterminée, face à une communauté internationale qui ne s'inscrit pas nécessairement dans la bonne trajectoire. La diplomatie française déploiera tous ses efforts pour inciter ses partenaires à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre, à décarboner leurs économies et à s'engager dans l'abandon des énergies fossiles. L'accord de Paris doit être mis en œuvre et nous veillerons avec une vigilance scrupuleuse à ce que les prochaines échéances, dont la 29ème conférence des parties à la convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (COP29), portent leurs fruits.
Bien évidemment, la question des financements est centrale pour la transition écologique. Les flux Nord-Sud sont déjà de l'ordre de 1 000 milliards de dollars mais cela reste insuffisant. La France prendra toute sa part dans cette entreprise. Je rappelle que notre financement pour le climat a atteint, en 2022, un record de 7,6 milliards d'euros. Nous souhaitons contribuer à retisser le lien de la solidarité internationale dans ce domaine, comme en témoigne l'initiative du pacte de Paris pour les peuples et la planète prise par le président de la République en juin 2023, qui encourage à aller plus loin dans le multilatéralisme.
La diplomatie que je mènerai sera non seulement climatique mais aussi féministe. Elle s'attachera à défendre les droits des filles et des femmes, sans concession, dans le monde entier. Je condamne notamment dans les termes les plus forts les violences sexistes et sexuelles commises par le Hamas lors de l'attaque du 7 octobre dernier contre Israël. Le Hamas a utilisé le corps des femmes comme une cible de guerre : c'est un fait. Il me semble important de mettre l'accent sur cette dimension, souvent oubliée dans cette tragédie.
Défendre les droits des femmes à l'étranger consiste également à promouvoir leur pleine participation à la vie politique, sociale et économique de leur pays. Je pense notamment à l'Afghanistan, où les femmes sont effacées de la société, où leur existence est totalement niée. Nous n'aurons de ce fait aucun dialogue avec les Talibans. Sachez que j'annoncerai le 8 mars prochain de nouvelles mesures visant à renforcer notre action dans le cadre de la diplomatie féministe.
Je souhaite enfin mettre l'accent sur les partenariats noués au sein de la francophonie. Le sommet de la francophonie, qui se tiendra en France en octobre 2024, sera l'occasion de valoriser les partenariats que nous voulons construire, des partenariats fiables, ouverts, fondés sur des valeurs partagées et porteurs d'opportunités pour nos concitoyens.
Je tiens, sur tous ces sujets, à entretenir un dialogue constant avec les parlementaires. Je pense notamment que le travail mené avec cette commission pourra s'avérer fructueux. Je crois à la diplomatie, y compris parlementaire : tous les engagements que nous pourrons prendre seront donc discutés avec vous.
Le 08/03/2024 à 14:24, cadaoule a dit :
Avez vous consulté le peuple français, de lus en plus exsangue, sur sa volonté d"e soutenir l'Ukraine et financièrement et militairement ? NON ! Vous discutez entre vous et décidez seuls d'utiliser nos impôts de plus en plus lourds pour des intérêts étrangers au pays,que vous êtes censés gouverner. C'est insupportable et cela doit cesser !!!
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