Intervention de Léo Walter

Séance en hémicycle du lundi 26 février 2024 à 18h00
L'école publique face aux politiques de tri social

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLéo Walter :

Je partage les inquiétudes de mes collègues quant au choc des savoirs voulu par Gabriel Attal et au renforcement des inégalités qu'entraînerait mécaniquement la création de groupes de niveaux, mais je souhaite vous alerter sur un autre type de tri social, un tri à bas bruit, qui passe inaperçu : celui qui affecte les élèves des territoires ruraux.

Dans mon département des Alpes-de-Haute-Provence, plus de la moitié des élèves doivent faire un choix dès l'entrée au lycée : soit partir en internat – ce qui peut être une bonne chose, sous réserve que des places soient disponibles et que cette orientation soit choisie, et non subie –, soit passer au moins deux heures par jour dans les transports. La journée d'un lycéen bas-alpin commence souvent par un départ de la maison à six heures trente, pour un retour à dix-neuf heures, voire dix-neuf heures trente, avant d'entamer les devoirs.

Dans mon département, dépourvu d'université et offrant peu de formations post-bac, faire des études supérieures implique de s'expatrier, ce qui suppose de se couper de ses attaches familiales et affectives et représente un coût inabordable pour beaucoup de familles. Toutes les études le montrent, les élèves ruraux s'autorisent des ambitions scolaires nettement inférieures à celles de leurs homologues urbains, indépendamment de leurs capacités scolaires. Comme souvent – comme toujours –, les enfants des milieux les plus populaires ou ayant les parents les moins diplômés s'autocensurent le plus dans leurs souhaits pour l'avenir.

Comprenons-nous bien : il n'y a pas de bonne ou de mauvaise carrière scolaire, il n'y a pas ceux qui réussissent et ceux qui ne sont rien – pour reprendre un mot tristement célèbre du président Macron. En République, au contraire, chacun doit pouvoir faire ses choix à égalité, en fonction de ses aptitudes et de ses centres d'intérêt. Tel n'est pas le cas dans les zones rurales. Les territoires éducatifs ruraux, lancés en 2021 sur le modèle discutable des cités éducatives, étaient censés répondre au moins en partie à ce problème. Quel retour d'expérience pouvez-vous faire de ce dispositif ? Plus largement, quelle politique nationale entendez-vous conduire pour mettre fin à ce déterminisme géographique ?

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