Je voudrais d'abord dire que lorsqu'un ministre passe son temps à dire aux enseignants ce qu'ils doivent faire dans leur classe – je rappelle qu'à la rentrée dernière, on nous a dit combien de dictées nous devions faire par jour, quels textes nous devions lire et quelle devait être leur longueur –, cela pèse sur le métier. De telles injonctions sont très pesantes et les nombreuses démissions ou demandes de rupture conventionnelle témoignent de la perte de sens du métier, qui est bien réelle. Nous avons besoin que l'on nous fasse confiance et nous voulons pouvoir continuer à exercer notre liberté pédagogique.
Pour les enseignants, ce retour proclamé à l'autorité est insupportable : ils ont déjà de l'autorité dans leurs classes ! Si le climat scolaire est si peu apaisé, c'est aussi parce qu'il y a trop d'élèves dans chaque classe. Cela a été dit : quand une classe de moyenne section de maternelle compte trente élèves – cela arrive –, il est impossible de s'occuper de tous.
Le retour à l'ordre et à l'autorité n'est donc pas très bien vécu par les enseignants : on entend râler dans les salles des maîtres ! Et ce phénomène va faire boule de neige dans les années à venir, parce que certains vont laisser tomber.
Enfin, s'agissant du redoublement, on dit désormais qu'on ne laissera plus les élèves qui n'ont pas le niveau passer dans la classe supérieure. Mais qu'en fera-t-on ? On ne peut pas laisser les élèves redoubler sans créer des dispositifs adaptés à l'intérieur des classes ; et sans moyens, ce n'est pas possible. Il faut faire de la prévention plutôt que d'empêcher les élèves d'aller plus loin tout en leur faisant faire des stages de remise à niveau l'été, ce qui les prive, eux qui sont issus des milieux populaires, de vacances et de séjours hors de chez eux, qui leur seraient pourtant beaucoup plus profitables.