S'agissant du maillage à Mayotte, le site principal, à Mamoudzou, comporte l'essentiel du plateau technique avec le service des urgences, la chirurgie et la réanimation. S'y ajoutent quatre centres médicaux de référence qui forment la deuxième ligne – une sur Petite-Terre et trois sur Grande-Terre. Ils assurent principalement la maternité et les soins programmés – les urgences légères. Il ne s'agit absolument pas d'un service d'urgence, et c'est d'ailleurs là une des difficultés. En troisième ligne, se trouvent les dispensaires qui assurent des consultations de médecine générale de base.
Le Smur est situé à Mamoudzou. Depuis trois ans, nous pouvons compter sur un héliSmur, et c'est une vraie assurance de sécurité. Nous disposons aussi de PSM – ce sont des boîtes contenant du matériel médical qui permettent de prendre en charge des victimes sur le terrain.
S'agissant de la logistique et du matériel, à court terme, je ne suis pas inquiet parce que notre pharmacie à usage intérieur (PUI) dispose de six mois de stock de médicaments et d'oxygène. Nous devrions donc tenir.
La difficulté, je le répète, tient, en cas de cyclone, à l'absence totale de préparation de la population, contrairement à La Réunion et aux Antilles. Il n'y a aucune culture du risque sur le territoire.
Habituellement, un cyclone fait peu de blessés relevant de la traumatologie – cela a été le cas pour Irma, semble-t-il. Il en irait très différemment à Mayotte où le bilan victimaire pourrait être très lourd dans ce qu'on appelle les bangas, dans les bidonvilles, où les tôles qui s'envolent pourraient causer de très gros dégâts. En outre, les capacités de mise à l'abri sont largement insuffisantes : les centres de vie, qui sont identifiés dans chaque commune, pourraient accueillir 30 000 personnes alors que la population est estimée entre 300 000 et 400 000 habitants.
Une autre fragilité que nous avons constatée, et qui perdure en 2024, est, au-delà même de la question de l'attractivité, le problème du turnover des professionnels de santé. Ainsi, le centre hospitalier de Mayotte est perfusé par des renforts nationaux : à titre d'ordre de grandeur, ce sont, en 2023, 1 200 professionnels de santé qui ont été envoyés à Mayotte pour permettre au moins au centre hospitalier de tenir. Ce turnover a pour effet que, sur notre territoire, à la différence de ce qui se passe notamment à La Réunion, où le Samu et les services d'urgence sont aguerris face à ces situations, de nombreux professionnels de santé manquent totalement de cette culture et il est très difficile de les former à la prise en charge d'événements causant de nombreuses victimes.
Un autre point de fragilité est l'aéroport, dont la piste est très courte et très fragile, ce qui accroît le risque qu'elle ne soit plus praticable. Ce danger, associé aux faibles effectifs de nos équipes, fait de la coopération régionale un enjeu important. La Réunion est trop loin pour nous fournir la base logistique de repli dont nous avons besoin et il faudrait, pour organiser une noria, pouvoir atterrir à Madagascar. Bien que je ne sois pas spécialiste de ces questions, j'insiste sur le fait qu'il conviendrait de sécuriser le dispositif aéroportuaire à Mayotte.