Les auditions ont permis de révéler la complexité des rouages de la distribution des médicaments en France, tout particulièrement pour le dernier kilomètre. De très nombreuses causes en amont sont à l'origine des pénuries constatées : production des principes actifs au bout du monde, contrôle de qualité, façonnage, conditionnement, acheminement, blocages administratifs, règles commerciales contradictoires tant au niveau mondial qu'européen – le tout dans un contexte géopolitique tendu.
Une fois les produits arrivés sur notre sol, tout reste à faire. L'opacité et les règles commerciales de concurrence dans un domaine de délégation de service public, la pénurie de prescripteurs, le désarroi des officines et des hôpitaux plongés dans un nouveau dédale administratif : tout est stupéfiant et source de nouvelles pénuries.
Il existe déjà une obligation de constituer un stock national, dont la taille varie selon les types de médicaments. Comme nous en 2020, vous proposez d'augmenter leur plancher. Nous soutenons bien entendu votre proposition, indispensable pour protéger les Français.
Pour autant, lorsque des pénuries en amont menacent des produits gérés à flux tendus ou s'il n'existe pas d'alternative, l'ANSM doit disposer de pouvoirs dérogatoires et être en mesure, grâce à l'article 1er, d'enjoindre de constituer des stocks avec un préavis adapté. Nous savons que ces derniers ont un coût : ils doivent être situés dans des lieux spécifiques et dépendent de lignes de production qui sont déjà saturées, tant en France qu'en Europe.
Leur gestion doit être aussi transparente que possible et l'ensemble des acteurs doit transmettre les données dont ils disposent. Celles-ci devraient être centralisées par un seul acteur sur une plateforme unique, ce qui contribuerait à une meilleure répartition des médicaments sur le plan national, voire internationale en cas de pandémie.
Cela remettra forcément en question la gestion à flux tendu de certains producteurs. Le stockage ne doit pas être un outil à double tranchant qui serait une cause secondaire de pénurie. C'est la raison pour laquelle j'espère que l'article 1er sera très sérieusement amendé, comme l'a proposé la rapporteure générale.