Suivant l'architecture que nous avions conçue, chaque média ou groupe de médias audiovisuels devait se doter d'un comité composé par nature de personnalités indépendantes, ne partageant en particulier aucun intérêt avec les actionnaires des médias concernés pendant les deux années précédant leur nomination, la durée de leur mandat et l'année suivant la cessation de leurs fonctions. D'une manière générale, leur indépendance à l'égard des intérêts de l'éditeur, des actionnaires ou des annonceurs avait fait l'objet de grandes discussions.
Nous souhaitions en outre que ces comités puissent être saisis ou consultés à tout moment par la direction du média ou du groupe en question, par le médiateur, s'il en existe un, ou par tout autre citoyen. Je suis d'ailleurs certain que l'immense majorité de nos concitoyens ignore que cette possibilité leur est ouverte.
Vous le disiez, il existe d'importantes disparités entre les modes de fonctionnement des différents comités d'éthique, qui conduisent à ce que l'esprit, voire la lettre, de la loi de 2016 ne soient pas respectés. Les rapports d'activité que ces comités d'éthique étaient chargés de rédiger et de transmettre chaque année à l'autorité de régulation devaient permettre à cette dernière d'être informée du respect, ou non, par les médias des obligations qui leur étaient faites du point de vue de la liberté, de l'indépendance et du pluralisme des médias. Or ce dispositif ne fonctionne pas, ou n'existe pas.
Lorsque viendra, pour l'autorité de régulation, le moment – qui ne se présente que tous les dix ans – d'exercer son pouvoir d'accorder ou non le renouvellement des autorisations d'émettre, le fait que les médias ou les groupes de médias qui le demandent respectent ou non la loi devra faire partie des critères d'appréciation.
De mon point de vue, il faudrait revisiter la loi du 14 novembre 2016. Elle n'est peut-être pas assez contraignante, mais toujours est-il qu'elle a été détournée de son objet par un certain nombre de médias. Dans notre architecture idéale, les comités d'éthique devaient jouer le rôle de lanceurs d'alerte, ou du moins permettre à l'autorité de régulation de disposer des informations nécessaires à son appréciation du respect de la loi par les médias dotés d'une autorisation d'émettre.