Madame Dalloz, la formulation que vous critiquez reprend les termes figurant déjà dans la loi pour le CNC : je n'ai donc rien inventé. De plus, le CNM résulte de la fusion de plusieurs acteurs, conçue dans le but d'accroître leur efficacité. Enfin, vous ne cessez de vous plaindre que des dispositifs ne fassent l'objet d'aucun débat en raison du recours au 49.3 : ne venez donc pas nous reprocher de faire de la communication quand nous discutons d'une disposition sur laquelle il me semble intéressant de recueillir l'avis de chacun. Rassurez-vous, madame Dalloz, je ne vais pas vous faire perdre votre temps trop longtemps car, dans quelques minutes, nous allons retirer ce texte. Je pense néanmoins qu'il était important, pour la filière musicale française, que nous débattions de la spécificité du modèle musical et culturel français, à savoir qu'il est largement subventionné ou aidé par l'État.
Je souhaite rappeler comment fonctionne l'écosystème musical. La musique en France, comme dans beaucoup de pays, fonctionne de façon très mutualisée. C'est grâce à la valorisation de leurs catalogues que les maisons de disques produisent des disques. Cela permet de mutualiser les risques et de faire émerger de nouveaux projets.
Le CNM fonctionne un peu de cette façon. La taxe sur les spectacles vivants n'est pas de 1,2 % mais de 3,5 %, avec cependant un droit de tirage de 65 %, qui ramène le taux effectif à 1,2 %. Si le texte n'avait pas été adopté après recours au 49.3, je vous aurais proposé des amendements pour arriver au dispositif finalement retenu par le Gouvernement. Il a l'avantage de la solidité juridique, car il respecte nos conventions et nos engagements sur le pilier 1 de l'OCDE.
Quant au taux de 1,2 %, il est paramétré pour arriver aux 15 millions d'euros nécessaires pour boucler le financement global du CNM. Il est donc inutile de fixer le taux à un niveau supérieur, car ce serait encore plus difficile à supporter pour les plateformes. Une telle contribution n'est en effet pas anodine et se doit d'être juste. Du reste, les plateformes en seront les premières bénéficiaires. En effet, sans la création musicale, en particulier la création musicale française, elles ne développeront pas leur taux de pénétration : le jour où il n'y aura plus de musique et que l'on devra se contenter du catalogue musical existant, nous ne serons pas nombreux à prendre des abonnements chez Spotify, Deezer, Apple Musique ou même Amazon, qui n'a pas pour l'instant d'offre mais qui contribue également à la taxe. Je pense donc que nous installons un modèle pérenne et juste, qui permettra réellement d'assurer le développement de la musique dans toutes ses dimensions – petits festivals, grandes productions phonographiques.
Monsieur Habert-Dassault, très peu d'entreprises seront à la fois assujetties à la taxe sur le streaming et à la TSN ou à la TSV. À ce jour, Deezer ou Spotify ne sont assujetties qu'à la TVA, au taux de 20 %. D'autres pays connaissent même un taux plus élevé : ainsi, en Suède, pays de naissance de Spotify, il s'élève à 25 %. La nouvelle taxe ne va donc pas nécessairement pénaliser les plateformes. Les opérateurs de streaming ne payent même pas d'impôt sur les sociétés puisque, pour la plupart, ils ne dégagent pas de bénéfices sur le territoire français. Certes, ils reversent 70 % aux ayants droit : c'est un effort remarquable, qui permet de faire vivre la musique. Toutefois, si l'on veut que le CNM puisse faire son travail et que la scène musicale française demeure active, cette nouvelle taxe est nécessaire.
Madame Grangier, vous avez annoncé que vous vous abstiendriez sur cette taxe. Je n'arrive pas à comprendre votre objectif : souhaitez-vous que la puissance publique continue son travail de soutien aux filières culturelles françaises ? À entendre vos propos, il est permis d'en douter.
Je retire cette proposition de loi, car le dispositif proposé figure désormais dans le PLF. Nous continuerons à débattre, en commission des finances comme en commission des affaires culturelles, de la question du CNM car il nous faudra évaluer l'effort que nous faisons en sa faveur et vérifier que cet organisme répond bien à ses missions.