L'article 5 vicies B du PLF pour 2024 tel qu'adopté en nouvelle lecture à l'Assemblée nationale prévoit l'institution d'une taxe sur le streaming musical au taux de 1,2 %, assise sur le chiffre d'affaires des plateformes. Comme je l'ai déjà indiqué, j'y suis favorable : je rejoins, moi aussi, les conclusions du rapport de M. Bargeton sur la nécessité de donner au Centre national de la musique les moyens d'une politique ambitieuse pour la filière musicale. En dépit du dialogue engagé par le Gouvernement avec les plateformes de streaming, aucun accord n'a pu être trouvé sur le montant d'une contribution qu'elles auraient versée volontairement. Il me semble logique que nous en tirions les conclusions en revenant à la solution qui avait été envisagée dès le départ.
En aucune manière, cette taxe ne doit remettre en cause la pérennité des plateformes, dont je voudrais saluer le travail : faisant partie de la génération qui a assisté au basculement des supports physiques vers le streaming musical, je sais qu'il n'était pas gagné d'avance que le modèle payant devienne le modèle dominant pour la distribution de la musique. Il est aujourd'hui essentiel, en particulier pour les auteurs-compositeurs.
L'examen de votre proposition nous permet d'analyser plus précisément la question de l'assiette et du taux de la taxe. Je partage le souci qui a été le vôtre de trouver une solution de financement pérenne pour le CNM tout en préservant le modèle économique des plateformes – peu d'entre elles dégagent des bénéfices –, notamment de l'entreprise française Deezer. Comme vous l'avez souligné, la mise en place d'un barème progressif peut toutefois soulever une difficulté au regard de nos obligations européennes en matière d'aides d'État. La solution retenue dans le cadre du PLF, avec un taux légèrement inférieur à 1,75 % mais exempt de mécanisme de progressivité, permet de sécuriser le dispositif en évitant toute discrimination qui aurait pu générer un contentieux. En dehors du taux, la taxe a une assiette relativement large puisqu'elle frappe le chiffre d'affaires des plateformes. Il apparaît qu'elle devrait également concerner les géants du numérique que sont les Gafa mais aussi YouTube et TikTok : nous devons être attentifs à ce que ces entreprises paient effectivement leur contribution.
S'agissant du rendement de la taxe, je constate que le dispositif de votre proposition de loi et celui prévu par le projet de loi finances permettent d'atteindre un montant similaire, aux alentours de 15 millions d'euros. Ce montant, qui correspond à l'objectif initial, est celui qui a permis au CNM de définir un budget pour 2024 la semaine dernière.
Votre proposition de loi contribue utilement à compléter et à préciser le débat relatif à la taxe qu'il est proposé d'instituer. Elle a atteint son objectif, qui consistait à créer les conditions nous permettant de parvenir à une solution satisfaisante de financement du CNM avant la fin de l'année.