Le scandale McKinsey, en pleine crise sanitaire, aura donc eu au moins un mérite : celui de faire éclater au grand jour de graves dysfonctionnements dans la prise de décision et de conduire à une commission d'enquête sénatoriale. Les conclusions de cette dernière furent, il faut bien le dire, édifiantes : un coût faramineux des dépenses de conseil engagées par l'État – dépassant 1 milliard d'euros, avec un doublement ces dernières années – pour aboutir trop régulièrement soit à des décisions en complet décalage avec les besoins de notre pays, soit à aucun projet concret. Autant dire que l'État jetait l'argent par les fenêtres ! Une administration et des fonctionnaires contraints de s'effacer devant des cabinets privés auxquels plusieurs ministères confiaient leurs expertises.
Quelque temps plus tard, un rapport de la Cour des comptes venait, hélas, appuyer et confirmer ces constats. En tant que parlementaires, nous sommes nombreux à avoir été choqués par ces révélations. Et que dire de nos concitoyens, qui avaient pris de plein fouet une crise covid gérée à l'emporte-pièce sur les conseils de ces cabinets privés ! Le groupe LIOT s'étonne que des pans entiers de l'action publique, relevant parfois même du domaine régalien, aient pu se voir ainsi confiés à des consultants et que l'État se soit régulièrement permis de refuser des moyens et des hausses de rémunération aux fonctionnaires – je pense surtout aux personnels soignants et aux enseignants – alors qu'il n'hésitait pas à payer un consultant 1 528 euros par jour !
Il était donc plus que temps de tourner définitivement cette page de notre action, voire inaction publique. Ce texte, qui n'a cessé de s'améliorer au cours des débats, le permettra de toute évidence. Entendons-nous bien : son objet n'est pas de tirer un trait sur les prestations de conseil, qui peuvent être utiles ; mais désormais, les cabinets auront des règles parfaitement établies et un vrai cadre à respecter. Nous saluons en particulier la transparence que cette proposition de loi assure, tant à l'égard du Parlement, avec la transmission d'un rapport dédié lors de l'examen annuel du budget, qu'à l'égard de nos concitoyens, avec des informations ouvertes et facilement accessibles à tous.
Nous saluons également le rôle de contrôle, central, confié à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique pour assurer le respect de ces nouvelles règles. Le volet répressif est une des clefs de ce texte. Le Parlement doit affirmer sa volonté d'être intraitable en cas de manquements aux règles de probité et de déontologie. C'est de cette manière qu'aucune société de conseil ne pourra plus passer entre les mailles du filet de la transparence.
Je regrette toutefois quelques reculs décidés en commission, notamment l'allègement des obligations de déclaration d'intérêts et la quasi-exclusion de la Caisse des dépôts du périmètre du texte. Enfin, notre groupe considère qu'une dernière étape reste à franchir : adapter ce type d'encadrement aux collectivités territoriales. Nous constatons qu'un amendement du Gouvernement entend les inclure dès à présent. Je comprends la volonté d'agir vite, mais je maintiens qu'il aurait été préférable de prendre du recul : une mission d'information dédiée à la question permettrait d'élaborer dans un second temps une loi sur mesure pour les collectivités.
Au-delà de ces réserves, le groupe LIOT réaffirme son plein soutien à cette proposition de loi qui constitue une belle avancée pour la transparence de nos politiques publiques.