Il est normal, en effet, que la question ne soit pas traitée uniquement dans la sphère médiatique et que la représentation nationale puisse en débattre sereinement.
La commission d'enquête sénatoriale a permis d'analyser finement et de manière détaillée l'ensemble des pratiques ayant cours dans ce domaine. Son constat est clair : l'État recourt de plus en plus aux cabinets de conseil, dont les interventions sont peu encadrées par le droit. Cette opacité a pu conduire à des dérives et peut, en conséquence, présenter des risques déontologiques et de conflits d'intérêts.
En la matière, le Gouvernement a immédiatement pris des mesures. D'abord, une circulaire a encadré le recours par les administrations et les établissements publics de l'État aux prestations intellectuelles. Ensuite, le cahier des clauses administratives particulières de l'accord-cadre de la direction interministérielle de la transformation publique a été refondu. Enfin, le syndicat représentatif des cabinets de conseil français a rédigé une charte de déontologie s'appliquant aux interventions de conseil auprès du secteur public.
Ces décisions étaient nécessaires, mais comme toute décision prise dans l'urgence, elles n'offraient que des solutions de court terme, qui devaient être complétées par des mesures de plus long terme élaborées avec l'ensemble des acteurs.
Tel est l'objet de la proposition de loi, qui vient compléter notre arsenal législatif en mettant en œuvre les recommandations de la commission d'enquête. Le texte a évolué au cours de la navette, de sorte que certaines dispositions initiales, trop lourdes pour les administrations, qui n'auraient pas été en mesure de supporter une telle augmentation de leur activité, ont été allégées.
Ce point est très important : nous devons rester vigilants aux monstres normatifs que nous créons quotidiennement dans cet hémicycle et qui justifient parfois le rejet exprimé par nos concitoyens, comme en témoigne l'une des revendications de nos agriculteurs. Nous sommes les garants de la bonne utilisation de l'argent public. Il est donc normal de contrôler ces dépenses, mais certaines sont compréhensibles lorsqu'on les étudie en détail.
Bien entendu, je comprends la volonté affichée sur nombre de ces bancs d'éclairer les zones d'ombre et d'éviter que des dérives, inacceptables, n'affectent la construction des politiques publiques. Mais n'empêchons pas nos administrations de travailler, et faisons en sorte de préserver leurs compétences et leur savoir en déléguant certaines prestations.
Ainsi, l'État n'a pas nécessairement intérêt à investir dans des compétences internes dans le domaine informatique, qui évolue constamment. Si nous avions maintenu la programmation et la maintenance informatique dans le champ du texte, nous aurions pris le risque de laisser l'administration prendre du retard sur le privé, et cela aurait été contraire au choc de simplification que nous appelons de nos vœux.
J'entends dire que le texte serait vidé de sa substance, mais regardons plutôt les avancées qu'il comporte : encadrement du recours aux cabinets de conseil et des pratiques des consultants, établissement d'un code de conduite pour lutter contre les conflits d'intérêts, déclaration sur l'honneur attestant de l'absence de conflits d'intérêts, saisine de la HATVP en cas de manquement déontologique. Voilà une belle illustration de l'utilité du travail parlementaire et de l'efficacité de la démarche transpartisane !
Ce texte utile s'attaque aux dérives et définit un cadre – j'espère que, lors de notre discussion, nous déciderons de réintégrer dans le champ de la proposition de loi les collectivités territoriales, qui ont massivement recours à ces prestations extérieures. Toutefois, sous d'autres aspects, il reste lourd ; certains de ses articles devront être examinés et débattus afin que nous parvenions au bon équilibre.
Merci aux rapporteurs pour leur travail et pour avoir constamment cherché à préserver l'équilibre entre, d'une part, l'Assemblée et le Sénat et, d'autre part, les forces politiques de nos assemblées.
Pour l'ensemble de ces raisons, et pourvu que certaines dispositions soient allégées, le groupe Démocrate votera en faveur de la proposition de loi.