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Intervention de Gabor Arany

Réunion du jeudi 18 janvier 2024 à 9h30
Mission d'information de la conférence des présidents sur les capacités d'anticipation et d'adaptation de notre modèle de protection et de sécurité civiles

Gabor Arany, sous-directeur adjoint de la planification de sécurité nationale au Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN) :

Je remercie votre mission d'information d'associer le SGDSN à ses travaux. Si la sécurité civile incombe pour l'essentiel au ministère de l'intérieur, assisté de ministères chargés de politiques sectorielles, le SGDSN y est associé de façon surplombante. Son rôle consiste à arrêter la doctrine de gestion des crises majeures et à veiller à la bonne organisation des services du Gouvernement si elles surviennent.

La création du SGDSN remonte à l'entre-deux-guerres, sous l'appellation « Secrétariat général à la défense nationale ». Le général de Gaulle y fut affecté – il y a rédigé Le fil de l'épée. Du petit état-major qu'il était à l'origine – un livre récent intitulé Au cœur de l'État, dont je recommande la lecture, en retrace l'histoire et le présente comme un « ectoplasme administratif » –, le SGDSN a pris en charge un nombre croissant de missions.

Chargé de conseiller l'exécutif, il est composé d'un nombre restreint d'agents – une centaine à l'origine –, issus d'horizons militaires et civils très divers, et travaille en lien avec les services de renseignement. Il s'est récemment étoffé de l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (ANSSI), qui compte plus de 500 agents. Chargée notamment de réagir en urgence aux cyberattaques dont la France est la cible, elle aide l'exécutif s'agissant de leur identification, de leur analyse et de leur gestion. Par ailleurs, le service de vigilance et de protection contre les ingérences numériques étrangères (Viginum), créé en 2021, lutte contre les ingérences étrangères et la manipulation de l'information.

En résumé, le SGDSN conseille et appuie l'exécutif. Il prépare notamment les conseils de défense, qui sont à la main du Président de la République, et offre un éclairage sur la planification de défense et de sécurité nationale.

La sous-direction de la planification de sécurité nationale fait partie de la direction de la protection et de la sécurité de l'État, qui est la composante historique du SGDSN. Parmi ses missions figure la définition de la stratégie nationale de résilience, déployée depuis 2021. Le SGDSN est responsable de la planification gouvernementale relative aux risques et menaces susceptibles d'affecter la vie de la nation.

Il s'agit d'assurer la protection des populations, l'intégrité du territoire et la permanence des institutions de la République. Le SGDSN assure la coordination de la planification nationale, dont certains aspects sont classifiés, en lien avec les autres ministères, s'agissant des risques de sécurité civile importants tels que les risques naturels – par exemple une crue de la Seine –, les risques technologiques et industriels – par exemple un accident nucléaire ou radiologique majeur – et les risques sanitaires présentant un caractère particulièrement grave – par exemple une pandémie d'Ebola, de variole ou de grippe, relevant toutes d'un plan générique.

Le SGDSN est compétent sur environ quinze plans ministériels, en haut du spectre.

En matière nucléaire, radiologique, bactériologique et chimique (NRBC), le plan vise à pallier les difficultés des ministères dans des domaines exigeant un haut degré d'expertise. Il inclut un volet relatif aux explosifs. Le risque peut sembler faible, mais sa réalisation aurait des effets de sidération majeurs sur la population et induirait un nombre de victimes élevé.

Le plan Vigipirate, élaboré à la fin des années 1970, est activé en permanence. Il comporte une centaine de mesures socles, complétées par des mesures additionnelles en fonction du niveau de posture adopté – il en existe trois. Nous sommes récemment redescendus du niveau sommital « urgence attentat », auquel nous étions depuis l'attentat du 13 octobre dernier. Nous avons conseillé à l'autorité politique de laisser passer la période des fêtes et la date anniversaire des attentats de Charlie Hebdo et de l'Hyper Cacher avant de faire évoluer la posture, d'autant qu'un remaniement du Gouvernement était en gestation.

Le SGDSN élabore la doctrine de planification et d'organisation de la gestion de crise par le Gouvernement. Le 23 janvier 2023, la Première ministre Élisabeth Borne a signé la directive générale interministérielle (DGI) n° 320 relative à la planification de défense et de sécurité nationale. Elle offre une matrice d'organisation moderne, garantissant un certain degré de modularité et de subsidiarité dans le traitement des crises. Auparavant, nous fonctionnions selon le schéma « Une crise, un plan ». La crise du covid-19 a montré que les crises sont de plus en plus protéiformes et transversales, ce qui exige un traitement agile. Elles sont aussi plus longues, de sorte qu'il n'est pas toujours nécessaire d'activer tous les plans en même temps. Ce qui importe est d'identifier un socle de mesures en fonction de la nature de la crise et d'activer des modules complémentaires selon sa spécificité.

Cette nouvelle matrice d'organisation identifie huit facteurs de crise majeurs, parmi lesquels trois risques – naturels, technologiques ou industriels et sanitaires – et cinq menaces – agression, attentat, troubles sociétaux graves, cyberattaque et hybrides –, ainsi que douze activités clés indispensables à la vie de la nation. Cet outil est très pratique pour identifier la nature exacte d'une crise et y remédier de la façon la plus efficace possible, en plaçant la sécurité civile au premier plan.

Par ailleurs, nous travaillons au déploiement de la plateforme Athéna, qui sera mise à la disposition de la cellule interministérielle de crise (CIC). Elle offrira un accès rapide aux fiches mesures associées aux grands plans gouvernementaux, grâce à une recherche par mots-clés, ce qui permettra d'identifier, dans les premières heures d'une crise, les mesures à prendre en priorité.

Le 26 septembre 2023, la Première ministre a promulgué la circulaire relative à l'organisation gouvernementale pour la gestion des crises majeures. Elle vise à encadrer les interactions entre les multiples acteurs, notamment lors de l'organisation d'événements sportifs internationaux tels que la coupe du monde de rugby et les Jeux olympiques et paralympiques (JOP). Elle est notre boussole.

Elle permet notamment d'organiser les échanges au sein de la CIC. Elle a offert l'occasion de valider les référentiels opérationnels de la CIC et du Centre national de commandement stratégique (CNCS), créé spécifiquement pour suivre le bon déroulement des JOP. Ces documents cadres sont utilisables à tout moment d'une crise, quelle que soit sa nature.

Le SGDSN apporte également un appui aux ministères dans l'organisation d'exercices de gestion de crise majeure. L'organisation successive de la coupe du monde de rugby et des JOP a offert l'occasion de tester l'articulation de la chaîne de commandement liant le CNCS et la CIC. Un exercice a été organisé les 5 et 6 décembre derniers. Nous travaillons sur des scénarios de rupture intégrant une dimension cyber et des manipulations de l'information, tant la communication et la sécurité civile sont des aspects fondamentaux de toute crise.

Par ailleurs, nous assistons les ministères dans la formation des personnels chargés de la gestion de crise. Depuis 2019, le SGDSN déploie un programme de professionnalisation des acteurs de la gestion de crise, qui a permis de former 900 personnes susceptibles d'être mobilisées dans le cadre du centre opérationnel de gestion interministérielle des crises (COGIC). Leurs profils correspondent aux compétences selon lesquelles est organisée la CIC – décision, analyse de situation, communication, anticipation. Leur formation leur a permis d'acquérir les réflexes de base, de sorte qu'ils savent comment gérer une crise et trouver dans les plans les façons d'y remédier.

On dit souvent du plan qu'il est la première victime de la crise. C'est malheureusement assez juste. L'analyse menée à froid n'en permet pas moins d'identifier les cas auxquels on peut être confronté, sans préjudice des effets de surprise, toujours possibles. La planification est de plus en plus pratiquée. Chacun a conscience de la nécessité de bien en maîtriser les outils. Nous menons des formations dans le cadre de l'Institut national du service public (INSP), de l'Institut des hautes études du ministère de l'intérieur (IHEMI) et du cycle des hautes études de service public (CHESP).

En matière d'anticipation, nous nous situons en haut du spectre. Depuis septembre 2021, le SGDSN anime le comité interministériel d'anticipation, qui travaille sur des scénarios classifiés d'atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation. Le plan Vigipirate, d'une certaine manière, est un outil d'anticipation permettant d'analyser la menace terroriste. Il est mise à jour tous les six mois et tient compte des vulnérabilités. Très documenté, il permet de définir le meilleur niveau de posture.

Quant aux directives nationales de sécurité (DNS), rédigées par chaque ministère pour son champ de compétence, nous les complétons en améliorant la documentation disponible en matière de planification. Ainsi, nous avons rédigé, dans le cadre de la DGI précitée, un référentiel interministériel dédié à l'anticipation opérationnelle. Composé de modèles faciles d'utilisation améliorant la recherche des informations clés et offrant une aide à la décision, il permet d'organiser la réflexion et le travail en situation de crise.

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