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Intervention de Michel Boyon

Réunion du jeudi 25 janvier 2024 à 14h00
Commission d'enquête sur l'attribution, le contenu et le contrôle des autorisations de services de télévision à caractère national sur la télévision numérique terrestre

Michel Boyon, conseiller d'État honoraire, ancien président du Conseil supérieur de l'audiovisuel de 2007 à 2013 :

À la défense du pluralisme et de la liberté d'expression, j'ajouterai un autre enjeu majeur : notre paysage audiovisuel, tel qu'il a été organisé, tel qu'il a fonctionné et tel qu'il a été régulé, a permis le maintien et le développement d'une production télévisuelle et cinématographique française dont nous pouvons être fiers. D'autres pays européens, comme l'Italie et l'Espagne, ont beaucoup de retard sur nous de ce point de vue, même s'ils essaient de le rattraper. Dominique Baudis a fait preuve de beaucoup de prescience.

Le métier de journaliste, de professionnel de l'information, est très difficile à exercer, si on veut le faire avec la conscience qui s'impose. Je me suis toujours dit que l'objectivité n'existe pas, ou plus exactement que c'est une asymptote : il faut y tendre, mais on ne l'atteint jamais. Ce qui importe, c'est l'honnêteté de l'information, et ce n'est pas un hasard si c'est ce mot qui a été retenu dans la loi de 1986. Il est suffisant pour que le régulateur puisse intervenir. Les chaînes sont par ailleurs en train d'imaginer des procédures pour garantir le pluralisme : certaines se sont dotées d'un comité d'éthique, d'autres utilisent des algorithmes...

Je sais aussi que des réflexions sont en cours au sujet du temps de parole des éditorialistes, qui n'est pas comptabilisé, à la différence de celui des personnalités politiques, sauf lorsqu'ils prennent position en faveur d'un candidat ou d'une formation politique : à ce moment-là, l'Arcom intervient. Je crois que le Parlement devrait se saisir de cette question, qui est difficile : nombre d'éditorialistes font leur travail honnêtement et de bonne foi, tandis que d'autres sont plus engagés. On peut leur demander de se montrer plus honnêtes, au sens de la loi de 1986, mais ce n'est pas simple.

Je redoute moins ce phénomène que la désinformation que je qualifierai d'accidentelle ou d'involontaire, et qui tient au fait que les rédactions peuvent se laisser influencer à leur insu par ce qui circule sur les réseaux sociaux. Ce qui me fait le plus peur, ce sont les fake news – je préfère le mot « infox » –, même si l'Europe essaie de trouver des moyens de les combattre.

On a tendance à reconnaître une information délibérément inexacte, mais il est beaucoup plus difficile d'identifier une information erronée involontaire. Cela me préoccupe beaucoup et on n'a pas encore trouvé la parade. Je vous invite à écouter l'émission « Les infox de l'Histoire » de Patrice Gélinet, sur France Info : il montre comment on a fait gober à l'opinion des énormités, qui sont maintenant considérées comme les tables de la loi.

Pour revenir aux éditorialistes, comptons d'abord sur eux. Et s'il faut édicter une règle pour éviter les déséquilibres, faisons-le.

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