Pour ma part, je souhaite revenir sur la question des consignes données par les employeurs. Vous avez pris l'exemple d'un meeting de Benoît Hamon, où il fallait absolument trouver un participant qui allait finalement voter Emmanuel Macron au premier tour. Je connais bien cet exemple, puisqu'il concerne ma rédaction.
Pour aller au-delà de cet exemple et parler de manière générale, il ne faut pas diaboliser les consignes données dans les rédactions. Selon moi, il est normal qu'à l'issue d'une conférence de rédaction, l'encadrement nous demande d'aller traiter tel ou tel meeting avec un angle précis, qui peut être par exemple les électeurs indécis. En revanche, la malhonnêteté peut survenir si cet angle ne résiste pas à la réalité du reportage, à la réalité des faits, si l'on ne trouve aucun électeur concerné par ce cas de figure et que l'on force presque quelqu'un à nous dire face à la caméra ce que l'on a envie d'entendre.
Collectivement, les rédactions doivent donc être organisées pour résister à cette pression, afin que cette insistance ne fasse pas partie de nos pratiques professionnelles. Individuellement, il faut aussi doter chaque journaliste d'un droit d'opposition effectif. Celui-ci existe dans la loi, mais nous devons être en mesure de pouvoir l'exercer. En résumé, il faut associer moins de précarité et plus de textes déontologiques opposables dans les entreprises pour permettre, collectivement et individuellement, de contrer ces dérives.