Mes chers collègues, l'audition de ce jour porte sur les stratégies de nos compétiteurs en Afrique, essentiellement la Russie, la Chine ou encore la Turquie, qui cherchent à y étendre leur influence. Ces stratégies sont multiples, notamment sur le plan diplomatique, mais également sécuritaire, comme le démontre le rôle joué par le groupe de mercenaires russes Wagner, la présence chinoise à Djibouti ou l'activisme turc en Libye, par exemple à travers l'exportation d'armes, notamment les drones.
Au-delà, ces stratégies sont également économiques et alimentaires. Ici, nous pouvons penser à la prédation chinoise sur les ressources naturelles en contrepartie de prêts à faible conditionnalité ou encore à l'instrumentalisation russe des enjeux d'exportation des céréales ukrainiennes vers l'Afrique. Une étude récente relevait que l'or extrait par Wagner en Afrique pourrait avoir rapporté au Kremlin jusqu'à 2,5 milliards de dollars, depuis le début de la guerre en Ukraine, ce qui est malheureusement la preuve du bon fonctionnement du néocolonialisme russe. Enfin, les stratégies mises en œuvre par ces compétiteurs sont informationnelles. Elles visent à modeler les opinions, en Afrique comme en Europe, par l'instrumentalisation des réseaux sociaux et des médias, pour imposer leur vision du monde, trop souvent au détriment de la vérité et de nos intérêts.
Pour nous aider à mieux comprendre la réalité de ces influences, les stratégies mises en place, ainsi que les États africains les plus concernés, nous avons le plaisir d'accueillir aujourd'hui trois chercheurs que je remercie pour leur présence et leur disponibilité. Monsieur Maxime Audinet, vous êtes chercheur à l'Institut de recherche stratégique de l'École militaire (IRSEM), dans les domaines de stratégie d'influence et des études russes post-soviétiques. Vous pourrez nous parler du rôle de la Russie, notamment en Afrique.
Monsieur Paul Charon, vous êtes directeur du domaine « Renseignement, anticipation et stratégie d'influence » de l'IRSEM et spécialiste de la Chine. Nous comptons sur vous pour nous expliquer les opérations d'influence chinoises en Afrique, mais aussi au niveau mondial.
Monsieur Jonathan Guiffard, vous êtes chercheur à l'Institut Montaigne. Vous travaillez notamment sur la Turquie et nous serions heureux de vous entendre sur les ressorts de puissance de la Turquie en Afrique, mais aussi sur les différents relais d'influence sur lesquels ce pays s'appuie pour relayer sa politique.