Votre remarque est tout à fait juste. De fait, il existe une manipulation principale du fait colonial et d'un narratif post-colonial. Il s'agit du ressort central de la désinformation russe que nous voyons se déployer et, de façon opportuniste, également de la Turquie et de la Chine, qui surfent sur cette vague postcoloniale. Nous y apportons des réponses sur le fond. Vous savez que le Président de la République a souhaité travailler très activement sur ces questions de mémoire, en ouvrant toute une série de chapitres qui restaient douloureux dans notre histoire avec le continent, en Algérie, au Cameroun et au Bénin avec les restitutions. Notre volonté, face à la montée de ce discours, est de répondre avec une attitude de vérité. Nous sommes prêts à regarder notre histoire en face. Nous avons ouvert cette démarche avec toute une série de pays, dont certains d'ailleurs sont plus ou moins volontaires pour la mener. L'action est appréciée et demande à être poursuivie.
Le Président de la République a également souhaité et mis en œuvre une réforme du franc CFA dans le courant de ses mandats. Il s'agit d'un des points d'accroche de la désinformation. Nous cherchons à faire mieux connaître cette réforme car il est impressionnant de constater que l'effet de désinformation reste plus prégnant que la réalité des démarches que nous avons engagées. Il faut aujourd'hui répéter qu'à l'initiative de la France et du Président Emmanuel Macron, nous avons réformé le franc CFA mais que la réforme n'a pas été jusqu'au bout du fait, sur certains aspects, d'un certain nombre de dirigeants africains qui n'ont pas souhaité se détacher de cette accroche monétaire.
Le reproche du double standard constitue un sujet plus vaste. Nous l'avons vu très largement émerger au moment de la guerre en Ukraine et aujourd'hui, il se cristallise dans le cadre du conflit que nous voyons se développer au Proche-Orient.
Tout notre effort de réforme de la gouvernance internationale vise à y répondre. La France, avec ses partenaires, est à la manœuvre pour réformer la gouvernance internationale de manière qu'elle soit plus représentative, légitime et efficace. Nous devons évidemment intégrer dans ces organes de gouvernance internationale des représentants des États émergents et des grands acteurs de la planète pour pouvoir la transformer et répondre aux besoins qui s'expriment dans certaines parties du monde. Nous soutenons la réforme du Conseil de sécurité. Nous avons soutenu, les premiers, la présence de l'Union africaine au G20. Nous sommes en train de réformer la gouvernance des institutions financières internationales pour permettre que les besoins de financement de la transition écologique, en Afrique notamment, soient pris en compte.
Nous répondons à cette demande qui relève de la souveraineté des États. À ce titre, nous sommes aujourd'hui des partenaires de souveraineté pour ces États, alors que la Russie et la Chine vont dans le sens contraire. La Russie met en cause la souveraineté des États par le chantage réglementaire et énergétique mais également Wagner. La Chine met quant à elle en cause la souveraineté des États par l'accumulation de créances qui créent une dépendance dans les décisions souveraines des États. Cette action doit également passer par un état des lieux de la signification de ce double standard. Aujourd'hui, le vrai double standard tient au fait que personne ne parle des conflits en Afrique, du Yémen, des victimes en Syrie ou en République démocratique du Congo. Il faudrait lire ce double standard dans le sens inverse.
Enfin, tous ces phénomènes bénéficient à un certain nombre de puissances autoritaires. La Chine et la Russie ont pour objectif stratégique de remettre en cause le système international pour proposer un autre système au bénéfice de leurs intérêts. Nous devons nous mobiliser avec tous les autres partenaires pour maintenir ce système international de façon rénovée, en répondant aux intérêts de tous les États souverains, pour que la souveraineté soit finalement au cœur de notre système. C'est ce que nous présentons comme offre à nos partenaires africains et plus largement à travers le monde. Il me semble que cette offre est aujourd'hui entendue.