En réalité, cette liberté est très fragile. Comme le souligne le Conseil d'État, elle ne fait à ce jour l'objet d'aucune consécration dans nos textes fondamentaux – ni dans la Constitution, ni dans la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni dans le droit de l'Union européenne. Si le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 27 juin 2001, a fait le choix d'adosser la valeur constitutionnelle de la liberté de la femme d'avoir recours à l'IVG à celle de la liberté de la femme prévue par l'article 2 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, le temps est venu de lui conférer une valeur constitutionnelle autonome.
Certes, la Constitution n'est pas un catalogue de droits sociaux. « La Constitution, c'est l'esprit d'un peuple, d'une époque et d'une volonté » déclarait Jean-Louis Debré le 4 octobre 2018, à l'occasion du soixantième anniversaire de notre loi fondamentale,
Je me réjouis que la rédaction proposée par le Gouvernement soit issue du long travail mené par l'ensemble des parlementaires. À l'Assemblée, à l'initiative des présidentes Panot et Bergé, nous avions adopté une proposition de loi constitutionnelle visant à garantir le droit à l'interruption volontaire de grossesse. Elle a été reprise et modifiée par nos collègues sénateurs – je salue à cet égard la sénatrice Mélanie Vogel. Des divergences sont alors apparues, quant à l'emplacement à choisir au sein de la Constitution, ou quant au choix sémantique de consacrer un « droit » ou une « liberté », afin de donner à la disposition sa pleine force. Toutefois, à l'Assemblée comme au Sénat, ces propositions de lois constitutionnelles ont été adoptées. Preuve qu'il existe une voie de passage et un consensus en faveur de la constitutionnalisation. Je salue également les associations féministes pour leurs propositions constructives.
Les rédactions adoptées ont été synthétisées par le Gouvernement, et enrichies des remarques pertinentes du Conseil d'État. La rédaction de compromis qui en résulte emporte notre approbation, parce qu'elle précise que c'est à la loi de garantir l'effectivité et l'accès à l'IVG. En d'autres termes, il revient aux représentants du peuple de déterminer les conditions dans lesquelles ce droit est exercé. Ainsi, la liberté de recourir à l'IVG sera protégée de façon pérenne, tout en continuant à être encadrée démocratiquement.
D'autre part, l'emploi d'une formule positive permet d'assurer la constitutionnalité de plusieurs dispositions importantes de notre droit, notamment la clause de conscience des médecins et des sages-femmes.
Résolument attaché à la liberté de choisir, le groupe Horizons et apparentés sera toujours guidé par la volonté d'empêcher toute remise en cause de l'équilibre défini par la loi Veil. Parce qu'il confère à cet équilibre une assurance solennelle et un caractère irréversible que rien ne pourra entraver ou défaire, nous voterons en faveur de ce projet de loi, dans sa rédaction initiale.