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Intervention de Marie-Noëlle Battistel

Séance en hémicycle du mercredi 24 janvier 2024 à 14h00
Discussion d'une proposition de loi — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-Noëlle Battistel :

ainsi que toutes celles et tous ceux qui, parmi nous, portent ce combat.

Ne laissons personne confisquer cette victoire.

À ceux qui prétendent que le droit d'avorter n'est pas menacé en France, je rappelle les exemples des sept États américains ayant, depuis l'arrêt de la Cour suprême, interdit l'IVG, même en cas de viol ou d'inceste. Je leur rappelle aussi l'exemple de nos voisins européens, comme la Pologne, où désormais seules les IVG en cas de viol ou de danger pour la vie de la mère sont autorisées ; comme la Hongrie, qui oblige les femmes souhaitant avorter à écouter battre le cœur du fœtus ; comme le Portugal, qui impose depuis peu aux femmes un examen psychologique préalable. Personne ne saurait préjuger de ce qu'il pourrait advenir demain en France.

Méfions-nous d'ailleurs, soyons vigilants, car, partout sur le territoire, les entraves à l'IVG prennent des formes de plus en plus pernicieuses de la part des mouvements antichoix, qui cherchent à tromper les femmes peu ou mal informées afin qu'elles poursuivent leur grossesse. Ces militants sont nombreux, y compris ici, et très organisés.

Nous devons aussi convaincre ceux qui pensent que la Constitution n'est pas un catalogue de droits et que le droit à l'avortement n'y a pas sa place. À ceux-là, nous posons la question suivante : la Constitution n'est-elle pas la norme suprême qui permet à la nation d'indiquer les valeurs et les principes auxquels elle donne une importance particulière ? En effet, la Constitution, la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, le préambule de la Constitution de 1946 font plus que fixer l'organisation institutionnelle notre pays ; ils rappellent les droits fondamentaux, les valeurs intangibles et tout ce qui fait la force d'une République indivisible, laïque, démocratique et sociale.

En ce sens, la constitutionnalisation des droits reproductifs se justifie pleinement en ce qu'elle permet de consacrer à la fois l'égalité des citoyens et des citoyennes ainsi que l'effectivité de leurs droits. La Constitution, Kelsen le souligne, est la loi des lois. Elle doit protéger ce qu'une simple loi pourrait défaire demain.

Enfin, à ceux qui estiment que ce droit serait déjà protégé par le juge constitutionnel et par le juge européen, nous répondons que le droit à l'avortement ne bénéficie pas de la protection juridique la plus forte. Non, il n'a jamais été consacré par le juge constitutionnel sous la forme d'un droit fondamental. Non, il ne jouit pas d'une protection constitutionnelle autonome. Non, il n'est pas protégé au niveau européen, en raison de l'absence d'un consensus sur la question.

Nous ne parlerons pas de ceux qui, pour des raisons purement politiques ou politiciennes, voudraient faire échouer ce projet. À ceux-là, nous n'avons pas de réponse à donner… si ce n'est de leur dire : « Pensez à votre responsabilité et au sens de notre mandat. Au moment du vote, pensez aux citoyennes qui comptent sur nous. » En 1975, l'opposition de gauche avait choisi la conviction plutôt que la posture, et la dignité plutôt que le calcul, pour faire adopter la loi Veil refusée jusque dans son propre camp. Nous leur disons : « Comme nous, répondez à la grande histoire. »

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