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Intervention de Éric Dupond-Moretti

Séance en hémicycle du mercredi 24 janvier 2024 à 14h00
Discussion d'une proposition de loi — Présentation

Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice :

Un mot, enfin, sur les effets attendus de cette révision constitutionnelle.

Tout d'abord – c'est un point important –, aucune disposition législative en vigueur ne devrait se voir remise en cause par l'adoption de cette révision de la Constitution. Le Conseil d'État lui-même l'a constaté, et telle est bien l'intention du Gouvernement. De manière claire et précise, et pour répondre par anticipation à certaines craintes exprimées ici ou là – je pense notamment à celles de la députée Bonnivard, qui pose des questions légitimes –, la consécration de cette liberté n'emporte la remise en question d'aucune autre liberté, et surtout pas de la liberté de conscience des médecins et des sages-femmes, qui leur permet de choisir de ne pas pratiquer d'IVG si cet acte est contraire à leurs convictions. Cette liberté-là est totalement préservée. Autre point important, le principe de respect de la dignité de la personne humaine est lui aussi préservé. Une loi qui porterait le délai maximal pour avorter à 30 semaines, par exemple, pourrait tout à fait être censurée, y compris avec la présente révision.

Ensuite, la rédaction proposée tend à rendre clair le fait que la décision d'avorter appartient à la femme enceinte, et à elle seule. Elle ne nécessite ni l'autorisation d'un tiers, que ce tiers soit le conjoint ou les parents, ni l'appréciation d'une autre personne. Cette liberté est strictement personnelle. Elle est d'ailleurs reconnue à toutes les femmes enceintes, et même à toute personne enceinte, sans considération de son état civil, de son âge, de sa nationalité ou de la régularité de son séjour en France.

Enfin, j'insiste sur ce point, cette rédaction ne vise pas à créer une forme de droit opposable, absolu et sans limites. Le Gouvernement n'ignore pas les difficultés matérielles et concrètes qui peuvent encore exister dans l'accès à l'interruption volontaire de grossesse, notamment dans certaines parties du territoire, mais il s'agit là d'un autre sujet, qui n'est pas d'ordre constitutionnel. Nous nous retrouvons aujourd'hui pour réviser la Constitution, et non pour voter je ne sais quelle mesure relevant du périmètre du ministère de la santé, lequel est pleinement mobilisé pour améliorer l'accès à l'IVG partout en France. Cette révision de la Constitution ne lèvera pas toutes les difficultés mais elle protégera les femmes, en France, d'une éventuelle régression brutale de leur liberté de recourir à l'avortement. C'est là la volonté exprimée par l'Assemblée puis par le Sénat ; c'est là l'objectif du Président de la République, repris par le Gouvernement.

Je veux prendre un instant pour remercier le rapporteur Gouffier-Valente, militant éclairé et infatigable du droit des femmes et partenaire hors pair dans le projet qui nous réunit aujourd'hui. Je sais que sa pédagogie a convaincu en commission, comme en témoigne l'adoption du texte.

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