Le titre de ce texte est prometteur, mais le Gouvernement ne compte même pas un ministre chargé du logement. L'exécutif n'a pas pris la mesure de la gravité de la crise que traverse le secteur, ni de l'urgence d'y remédier. Un ministre sera-t-il nommé d'ici à l'examen en séance publique, prévu lundi prochain ? Le contraire ne serait pas sérieux, surtout si l'on pense aux coups de rabot prévus dans le budget 2024, comme sur le prêt à taux zéro, ou à l'évolution du dispositif MaPrimeRénov', qui fait craindre que le nombre des rénovations diminue encore et qu'un nombre massif de logements sortent du parc locatif, faute pour leur propriétaire de pouvoir passer le mur de l'interdiction de louer en cas de mauvais classement énergétique.
Plus de 100 000 copropriétés sont considérées comme fragiles ; de plus en plus de copropriétaires ne parviennent plus à payer les appels de fonds trimestriels. L'exigence de mener des travaux de rénovation, notamment énergétique, a aggravé la situation. Il faut donc définir un cadre plus strict pour l'administration des copropriétés, tout en prévoyant des mesures plus protectrices pour les copropriétaires.
Plusieurs mesures techniques du texte vont dans le bon sens ; nous les soutiendrons. Ainsi, l'article 1er prévoit d'élargir la définition des opérations de restauration immobilière. Malheureusement, en l'état, le projet de loi n'est pas suffisant pour relever les défis que posent les logements dégradés et pour atteindre les objectifs d'accélération de rénovation des copropriétés.
Certaines idées sont bonnes mais les mesures pourraient se révéler inopérantes ou presque. Par exemple, l'article 2 prévoit de faciliter les emprunts collectifs, mais il soulève des questions. Tous les copropriétaires, même lorsqu'ils ne veulent pas en profiter, seraient tenus de participer pendant plusieurs années au remboursement. Quel sort réserveront les prêteurs et les organismes de caution à ceux inscrits au fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP) ? L'État accordera-t-il des garanties aux copropriétaires défaillants ? Quelles seront les conséquences sur le cautionnement solidaire chargé de garantir le syndicat ? Quels organismes accepteront de cautionner ce risque avéré, et avec quel surcoût ? Plus généralement, la question se pose de l'accompagnement des copropriétaires modestes.
Lorsque les copropriétés doivent adopter des programmes pluriannuels de travaux, le financement est un enjeu essentiel. Ne faut-il pas leur laisser le choix entre le nouveau prêt collectif, avec une adhésion obligatoire, et le prêt collectif à adhésion individuelle, tel qu'il existe ?
Toutes ces questions m'incitent à penser que ce projet de loi mérite d'être largement précisé. Il contient des articles intéressants, notamment pour améliorer les procédures d'expropriation ou de préemption, lorsque c'est justifié. Toutefois, il faut envisager la suite : de quels moyens disposeront les collectivités ou leurs opérateurs pour rénover les logements dégradés ? Combien d'immeubles en ruines, acquis par les collectivités, sont difficilement rénovés, faute de moyens ? La situation sera plus compliquée encore si la collectivité devient propriétaire d'un logement dégradé appartenant à une copropriété. Comment interagira-t-elle avec la copropriété ? Une fois le logement rénové, devra-t-elle le conserver ou le céder ? Pourra-t-elle le vendre au prix du marché, si celui-ci est inférieur au montant consenti pour réaliser les travaux nécessaires ?