Il n'y a pas d'Arcom en Allemagne ni de CSA. Le système de l'audiovisuel public est un peu différent. Il est beaucoup mieux financé – la redevance télévisuelle est l'une des plus élevées d'Europe et le versement est obligatoire dès lors que l'on dispose d'une connexion internet. Aussi, historiquement, l'audiovisuel public allemand a toujours été assez riche. Le mode de désignation des présidents de chaîne ne passe pas par l'exécutif ni par le législatif, mais par l'ensemble des parties prenantes de la société. Des représentants politiques, associatifs et religieux siègent dans une commission d'une trentaine de personnes pour désigner le président de la chaîne, avec un système de ticket : si le président de chaîne est proche de la majorité, son adjoint sera du principal parti d'opposition, l'adjoint de l'adjoint sera proche de la majorité, tandis que l'adjoint de l'adjoint de l'adjoint sera proche de l'opposition. C'est un système de tuilage, régulé par la cour constitutionnelle qui a rendu plusieurs rapports, dont l'un très important en 2012, sanctionnant les modes de désignation trop politiques de cette présidence, à l'issue d'une démarche des petits partis d'opposition, notamment les verts et les libéraux, qui ont du mal à accéder à ces positions.
Le mode de désignation étant politique, il n'y a pas de contrôle des temps de parole. C'est une forme d'autocontrôle, puisque chaque parti sera relativement bien représenté. Ce mode de fonctionnement ne va pas sans effets négatifs : l'audiovisuel privé est beaucoup plus faible ; il n'y a pas de TNT ; peu de chaînes d'information en continu ; et beaucoup moins de reportages d'investigation du type Envoyé spécial. On va beaucoup moins regarder dans les coulisses. On pourrait s'en satisfaire, au prétexte qu'on ne serait pas dans la politique politicienne, dans les petits coups, dans les coulisses, mais cela a pu récemment donner l'impression, notamment utilisée par l'AFD, le parti de l'extrême droite, d'un entre-soi politique.
La régulation vient aussi des journalistes eux-mêmes, puisque, depuis les années 1950, un comité d'éthique des journalistes peut prendre des positions publiques, attribuer des blâmes publics lorsque les pratiques journalistiques paraissent déviantes. Depuis quelques années, il existe un conseil de déontologie du journalisme en France mais il est sans commune mesure avec ce comité allemand. Ce serait plutôt un tigre de papier.