Je tiens d'abord à remercier l'ensemble des personnes qui ont accepté d'être auditionnées par le groupe de travail au cours des derniers mois, sur une question importante. Je remercie également Anne Bergantz avec laquelle j'ai travaillé ainsi que l'ensemble de nos collaborateurs qui nous ont apporté un soutien essentiel.
La mortalité infantile, définie par le décès d'un enfant avant l'âge d'un an, est un marqueur de santé publique important. Elle a diminué durant tout le siècle. En effet, au début du siècle, cent quarante enfants décédaient durant leur première année de vie pour mille naissances. Actuellement, le ratio s'élève à trois décès pour mille naissances.
À partir de 2012, nous constatons que la mortalité infantile augmente à nouveau en France et uniquement en France puisque cette dégradation n'a pas été observée dans les pays voisins qui proposent un niveau de soins équivalents. Cette augmentation de la mortalité infantile nous a interpellés et nous avons tenté d'en identifier les raisons.
Plusieurs travaux ont été menés à ce sujet et ont confirmé cette évolution, notamment l'étude publiée en février 2022 dans la revue scientifique Lancet Regional Health Europe (dite « The Lancet »), par une équipe française de l'hôpital Necker. Si nous comparions la France à la Suède, par exemple, pays très vertueux en matière de mortalité infantile, ce constat correspondrait à un surplus théorique de mille deux cents morts par an, en France, d'enfants de moins d'un an. Pour des raisons pédagogiques, les auteurs de l'étude du Lancet avaient précisé que ce chiffre indiquait que l'équivalent de quarante-huit classes de maternelle mourrait en France chaque année, sans que l'on en connaisse réellement les raisons, au-delà des décès malheureusement inévitables.
Il apparaît que 75 % de cette mortalité sont enregistrés essentiellement au cours de la première semaine de vie. Il s'agit alors d'une mortalité néonatale précoce qui intervient entre le premier et le septième jour d'existence.
Il est très intéressant de constater qu'il y a une trentaine d'années, une diminution drastique de la mortalité infantile a été observée grâce à la simple application de recommandations de couchage. En effet, il importe de coucher les enfants sur le dos, dans une turbulette, sans couverture, dans leur propre lit et sans animal auprès d'eux. Ces recommandations ont permis de diminuer la mortalité. Ce message de santé publique s'est avéré très efficace, mais il a été le dernier message de santé publique en date. Ce constat nous a interpellés.
Les causes de cette mortalité infantile sont potentiellement multiples, mais elles ne sont pas connues. Nous avons donc fait un certain nombre de recommandations parmi lesquelles la nécessité d'analyser la situation. En effet, nous ne disposons d'aucun registre unifié en France qui puisse permettre d'identifier l'âge de la grossesse à l'accouchement, le poids de naissance, les conditions socio-économiques, l'obésité éventuelle de la mère, son tabagisme, les conditions d'accouchement, par césarienne ou par voie naturelle, etc. Nous ne disposons pas de ces données et c'est pourquoi il nous paraît nécessaire de mettre en place un registre national des décès de sorte analyser pleinement la situation et les causes de sa dégradation.