Intervention de Nicolas Turquois

Réunion du mercredi 20 décembre 2023 à 9h30
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNicolas Turquois, rapporteur :

Le sujet de l'emploi peut nous rassembler autour de certaines valeurs, économiques ou sociales. C'est par l'emploi, en effet, qu'on peut renouer avec la promesse d'intégration et d'ascension sociale.

L'expérimentation ayant commencé en 2018, j'avais proposé dans un premier temps la pérennisation du CDIE – cinq ans, cela commence à faire long, même si le covid a limité au début la promotion du dispositif. Mais les auditions ont mis en lumière le problème du manque de données. Je ne pouvais donc pas, en responsabilité, présenter un texte visant à pérenniser une mesure qui, par son caractère dérogatoire, emporte de nombreuses conséquences.

Pourquoi avons-nous toujours aussi peu de données ? Pourquoi les entreprises ne font-elles pas remonter les informations ? Il faudrait que la DSN, qui doit être complétée pour chacun des salariés, comporte les données relatives aux CDIE. Le ministère nous a fait savoir que la création d'un module spécifique au CDIE au sein de la DSN nécessiterait deux ans. Je donnerai donc un avis favorable à un amendement visant à allonger de quatre ans la durée de l'expérimentation. Cette durée devrait nous donner le recul nécessaire pour disposer enfin des données que nous attendons.

Contrairement à ce qu'a dit Hadrien Clouet, le dispositif dont nous discutons n'est pas un contrat d'intérim : c'est un CDI. Or embaucher en CDI une personne de 57 ou 58 ans, qui plus est éloignée de l'emploi, constitue un risque pour l'employeur. C'est bien pourquoi on lui proposera davantage un CDD ou un contrat à temps partiel, et des fonctions qui n'exigent pas de qualification. Elle n'a aucune chance de se voir offrir un CDI, qui conditionne l'octroi d'un emprunt ou l'obtention d'une formation. L'intermédiation par le CDIE permet précisément de proposer un CDI, ce qui constitue une avancée notable. En contrepartie, le contrat sera partagé dans le temps entre plusieurs entreprises situées sur un même territoire. Mais la personne pourra bénéficier de formations pendant les périodes de travail et entre deux missions. Ces avancées ont justifié le dépôt de la proposition de loi.

Sur la concurrence entre l'intérim et le CDIE, les entreprises que nous avons auditionnées nous ont dit que le premier correspondait, pour un nombre important de salariés, à un choix de vie : ces personnes ne souhaitent pas s'engager dans la durée. Cela pose d'ailleurs des problèmes aux entreprises, qui hésitent à investir dans leur formation. Peu de personnes passent de l'intérim au CDI intérimaire. Les entreprises de l'intérim voient dans le CDIE une forme de concurrence déloyale car, disent-elles, les salariés susceptibles d'être recrutés ont le même profil. Je serai donc favorable à l'amendement qui vise à mieux cibler le public concerné. À l'heure actuelle, les personnes pouvant prétendre à un CDIE doivent être au chômage depuis au moins six mois et être âgées de plus de 50 ans – ce qui ne suffit pas à montrer l'éloignement de l'emploi. En redéfinissant la cible, on pourrait faire du CDIE un véritable outil d'insertion par l'activité sans concurrencer le CDI intérimaire. En tout état de cause, le CDIE n'est pas un CDI au rabais : il est proposé à des personnes à qui on ne propose pas un CDI habituellement.

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