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Intervention de Mireille Clapot

Réunion du mardi 12 décembre 2023 à 18h00
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMireille Clapot, vice-présidente de la commission des affaires étrangères :

Permettez-moi tout d'abord d'excuser l'absence du président Jean-Louis Bourlanges. Il aurait souhaité être parmi nous mais n'a pu décommander d'autres engagements au titre de ses fonctions et m'a donc demandé de le représenter. Au nom de la commission des affaires étrangères de notre Assemblée, je me félicite de la tenue de cette réunion commune sur une thématique qui intéresse au plus haut point l'ensemble de mes collègues.

Coïncidence de calendrier sans doute non fortuite, nous abordons ce sujet au moment même où s'achève la COP 28, qui doit déboucher sur des avancées pour le financement des pertes et dommages pour les pays les plus vulnérables, au premier rang desquels figurent les pays africains.

Si l'Afrique est le continent qui contribue le moins aux émissions de gaz à effet de serre – 7 % des émissions depuis le milieu du XIXe siècle, contre 45 % pour l'ensemble des pays développés –, elle est malheureusement l'un de ceux qui en subit le plus directement et massivement les conséquences. Le continent africain se réchauffe en effet plus vite que la moyenne mondiale, puisque ses températures ont augmenté de 1,4 degré depuis l'ère préindustrielle, contre 1,1 degré à l'échelle du globe. À titre d'illustration, les pays d'Afrique de l'Ouest sont d'ores et déjà confrontés à des températures excédant en moyenne les 40,6 degrés pendant deux mois. Cette canicule pourrait s'étendre sur quatre mois et demi à l'échéance de 2060 et sur plus de la moitié de l'année à la fin du siècle.

Dans une publication du 30 août 2023, le Fonds monétaire international (FMI) a mis en exergue le fait que le changement climatique en Afrique aggrave considérablement les conflits et les difficultés telles que la famine, la pauvreté et les déplacements forcés. Selon cette même publication, d'ici à 2060, les décès liés aux conflits pourraient augmenter de 14 % dans les pays confrontés à une hausse extrême des températures. Cela concerne trente-neuf pays abritant près d'un milliard d'habitants et 43 % des personnes les plus pauvres, dont la moitié se trouve en Afrique. Très concrètement, les pénuries d'eau pourraient déplacer jusqu'à 700 millions d'Africains au cours de la décennie. D'ores et déjà, la Corne de l'Afrique connaît sa pire période de sécheresse depuis quarante ans. Plus de 50 millions de personnes souffrent de la faim. Parallèlement, jusqu'à 116 millions de ressortissants africains seront affectés par les dangers liés à l'élévation du niveau de la mer au cours de cette décennie.

Les échanges de cet après-midi permettront, nous l'espérons, de mieux appréhender la manière dont nous pouvons aider l'Afrique à faire face aux défis du changement climatique. Nous attendons également de cette réunion des précisions sur l'action et les initiatives d'ores et déjà engagées par notre pays, ses partenaires européens et occidentaux dans la lutte contre le dérèglement climatique sur le continent africain. En effet, les enjeux du changement climatique et de ses conséquences pour l'Afrique nous concernent très directement, non seulement parce que les liens entre la France et le continent africain sont étroits et importants mais aussi parce que l'impact du dérèglement du climat en Afrique peut se répercuter jusque sur notre territoire hexagonal ou nos outre-mer, dans l'océan Indien notamment.

Il nous faut intégrer davantage la prise en compte du changement climatique dans nos actions de coopération internationale avec l'Afrique, au niveau de notre aide publique au développement mais aussi de nos partenariats économiques et diplomatiques. En effet, le réchauffement climatique a d'ores et déjà des conséquences dramatiques pour les populations locales, qui menacent la réalisation des objectifs de développement durable à l'horizon de 2030.

Je voudrais par ailleurs souligner la diversité des contextes africains et des enjeux qui se posent aux pays de la région, selon leur environnement géographique, météorologique, politique et économique. Ne sous-estimons pas, malgré le titre de cette table ronde, que l'Afrique est plurielle et que les enjeux climatiques auxquels sont confrontés les pays de ce continent sont spécifiques à chacun. Enfin, pour sortir d'une relation à sens unique entre la France et cette Afrique plurielle, je pense qu'il est important de mesurer ce que l'adaptation de certains pays africains, comme ceux de la bande du Sahel, qui ont appris à vivre depuis toujours avec la sécheresse, l'aridité, le manque d'eau, peut nous apporter pour que la France prépare sa propre adaptation au changement climatique.

Permettez-moi, pour finir, d'avoir un mot pour les femmes et les filles d'Afrique, qui payent un lourd tribut aux modifications climatiques, en particulier parce qu'elles ont la charge de l'approvisionnement en eau. Nos échanges d'aujourd'hui interviennent donc à propos et je suis heureuse qu'ils mobilisent nos commissions. À n'en pas douter, cet intérêt est largement partagé parmi nous et cette réunion devrait s'avérer particulièrement enrichissante.

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