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Intervention de Jean-Christophe Niel

Réunion du jeudi 23 novembre 2023 à 9h30
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Jean-Christophe Niel, directeur général, Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) :

. – L'IRSN a déjà pratiqué une expertise sur des réacteurs autres que ceux d'EDF, comme les réacteurs à eau pressurisée ukrainiens ou ceux de la propulsion navale, puisque l'IRSN assure l'appui technique de l'Autorité de sûreté nucléaire défense, de même que des réacteurs à neutrons rapides comme Phénix, Superphénix et, plus récemment, Astrid. Je peux également mentionner les réacteurs de quatrième génération, qu'ils soient refroidis au gaz, au sodium ou au plomb, des réacteurs très haute température, à eau supercritique ou à sels fondus. Beaucoup de SMR utilisent aujourd'hui ces technologies.

Nous avons travaillé sur nos modes d'instruction réglementaires et d'expertise pour ces SMR innovants, y compris dans le cadre des échanges internationaux, puisque nous appuyons l'ASN dans le cadre de la revue de NUWARD. L'IRSN a même travaillé sur un processus de licensing commun. Il s'agit évidemment de renforcer la maîtrise des processus pour des concepteurs qui ne sont pas encore complètement familiers des réglementations et des attentes en termes de démonstration de sûreté, voire de sécurité nucléaire et de radioprotection. L'IRSN a mis en place des séminaires sur la maturation des projets, a identifié des chefs de projets : Philippe Dupuy pour l'ASN et Sébastien Israël pour l'IRSN, et dispose de contacts plus ou moins avancés avec l'ensemble des concepteurs présents aujourd'hui. Par ailleurs, l'IRSN a donné un avis sur le dossier d'options de sûreté du réacteur Jimmy et a reçu cet été celui du réacteur NUWARD.

Le niveau de maturité des projets est variable et s'appuie en partie sur le retour d'expérience (REX) acquis. Celui-ci est très élevé sur les réacteurs à eau légère soit pressurisée soit bouillante : plusieurs milliers d'années-réacteur d'exploitation cumulées ; élevé pour les réacteurs à neutrons rapides refroidis au sodium : plusieurs centaines d'années ; moyen pour les réacteurs à haute température : une centaine d'années. Pour les autres concepts, le retour d'expérience est bien sûr beaucoup plus limité.

Pour la majorité des projets, des travaux de R&D, utiles à la modélisation, sont nécessaires en support à la conception, mais aussi à la démonstration de sûreté. Les efforts de R&D ont historiquement porté sur les réacteurs à neutrons rapides refroidis au sodium et les réacteurs à haute température. La plupart des projets proposent des programmes de R&D ambitieux, intégrant la réalisation de maquettes ou de prototypes, afin de disposer in fine de données représentatives. Dans le cas des réacteurs de quatrième génération, l'IRSN a identifié, dans un rapport de 2014, des sujets de R&D sur les matériaux – compte tenu des environnements à haute température, 400 à 500 degrés pour le plomb, ou corrosifs, comme les sels fondus –, le contrôle et l'inspection des installations – rendus difficiles par la compacité des installations ou l'opacité des fluides caloporteurs –, ainsi que l'étude des phénomènes accompagnant les accidents graves – avec des phénomènes de dégagement d'énergie ou des rejets radioactifs ou chimiques. Ces travaux de R&D doivent être menés en lien avec la filière concernée.

S'agissant de la sûreté, même si ces réacteurs sont de moindre puissance que ceux actuellement en fonctionnement – la plage est large entre des réacteurs de quelques mégawatts et de quelques centaines de mégawatts –, ils renferment des quantités importantes de produits radioactifs. Dans la mesure où certains concepteurs envisagent des implantations à proximité de zones habitées ou de grands sites industriels, les exigences de sûreté doivent permettre de limiter notablement les conséquences des situations accidentelles envisageables. En fonction de la filière, la taille du réacteur peut avoir un effet sur les caractéristiques de sûreté qui peut être favorable. Par exemple, pour les réacteurs à haute température, une taille réduite limitera le comportement neutronique du cœur.

De manière générale, il est utile de privilégier des concepts « pardonnants » c'est-à-dire peu sensibles aux événements qui peuvent se produire dans l'installation ou à l'extérieur de celle-ci. De plus, les enjeux de sûreté concernent également le cycle du combustible. La sûreté des installations associées doit donc être examinée de manière concomitante à celle du réacteur. Nous considérons que la construction de maquettes en appui de la justification de sûreté des installations doit être envisagée par les concepteurs. Les prototypes devraient être instrumentés de manière spécifique, pour répondre à la compréhension nécessaire des enjeux de sûreté. En conclusion, l'IRSN peut contribuer à la formation aux sujets de la sûreté nucléaire et de sa démonstration. Nous disposons du système de logiciels Accident Source Term Evaluation Code (ASTEC), en particulier pour les accidents graves, que nous sommes prêts à partager avec ceux qui le souhaiteraient.

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