L'Institut Paris-Région a réalisé un travail sur les logements considérés comme des passoires thermiques et cherché à estimer la ponction que l'interdiction de leur location représenterait sur le parc francilien. Bien que nos données soient datées, elles fournissent une première perspective. Nous constatons que 45 % des logements en Île-de-France présentent une faible performance énergétique, avec une proportion qui atteint 55 % dans le parc locatif privé. Cela fait peser une menace nouvelle sur cette offre de location privée, déjà en déclin.
Il est crucial de rappeler l'importance de cette offre dans les parcours résidentiels en Île-de-France. En effet, 90 % des étudiants et 80 % des salariés en mobilité provenant d'autres régions recourent au parc locatif privé. La diminution de cette offre compromet l'attractivité locative, accentuant la rareté et la pression sur ce secteur, notamment dans la centralité francilienne.
Des interrogations subsistent quant aux stratégies des bailleurs face à ces nouvelles obligations. Le risque existe d'une augmentation des locations hors du cadre légal, car certains bailleurs pourraient vouloir se soustraire à leurs obligations, créant ainsi une incitation à des pratiques de location indésirables. À titre d'illustration, deux tiers des logements à Paris pourraient être concernés par une interdiction de location d'ici 2034 et un tiers d'ici 2028.
Pour ce qui est des bailleurs sociaux, confrontés à un mur d'investissements, 29 % du parc locatif social en Île-de-France est classé en catégories E, F ou G. Les nouvelles obligations légales représentent des investissements considérables, sources de difficultés pour des bailleurs qui sont, par ailleurs, engagés dans des calendriers financiers contraignants et concomitants au titre, par exemple, du renouvellement urbain. Leurs projets de production peuvent ainsi se trouver compromis. La crise actuelle et la concomitance des obligations d'investissement conduit à une chute potentielle de la production de logements sociaux, comme le confirment les scenarii présentés par la Banque des territoires.
La demande locative sociale en Île-de-France est en constante augmentation et atteint désormais 780 000 demandeurs. Or on observe un décalage croissant entre les revenus des demandeurs et la capacité à produire des logements qui correspondent à leurs profils de revenus, en particulier des logements très sociaux. La majorité des demandeurs, même avec des revenus très modestes, sont des actifs en activité, ce qui remet en question l'opposition entre le logement social ou très social et celui destiné aux actifs. En effet, 72 % des demandeurs en attente d'un logement social correspondent aux plafonds les plus sociaux (PLAI), alors que la production actuelle se situe autour de 30 %. Ce décalage est ancien et récurrent et atteste qu'il est difficile, pour les montages financiers des bailleurs, de correspondre à la réalité des besoins sociaux.