Souvenez-vous de l'infirmière tuée à Reims. Elle est morte non seulement sous les seuls coups de son agresseur, mais aussi sous les décombres de la psychiatrie française qui, faute de moyens, laisse des patients dangereux en liberté. Les rapports d'information ne manquent pourtant pas, tout comme les deniers publics puisque la psychiatrie demeure le premier poste de dépenses en matière de santé, soit 14,5 % de la facture annuelle et 23,4 milliards d'euros pour l'assurance maladie.
Comment expliquer ce paradoxe ? Le constat est le suivant : la psychiatrie est en crise, mise à mal par les conséquences de la crise sanitaire et par les plus de 30 % de postes non pourvus dans les hôpitaux publics selon les données de la Fédération française de psychiatrie. Je connais les efforts consentis depuis plusieurs années, mais ils ne valent rien en l'absence d'un grand plan dédié à ce secteur. À cet égard, notre ambition pour la psychiatrie doit être triple : promouvoir le bien-être mental et repérer plus facilement les situations de souffrance psychique ; garantir une offre de soins accessible et diversifiée ; améliorer l'insertion des personnes en situation de handicap mental.
J'évoquerai également le dispositif Mon soutien psy, d'ailleurs instauré à la suite des assises de la santé mentale et de la psychiatrie. En effet, s'il vise à améliorer l'accès aux soins et à lutter contre les inégalités dans le domaine de la santé, il est boycotté par de nombreux psychologues. Un an après son lancement, le dispositif ne compte que 2 200 praticiens volontaires conventionnés, soit 7 % des psychologues libéraux, pour une moyenne de 4,1 séances par patient. Les praticiens dénoncent le plafonnement du prix des séances, très inférieur aux tarifs couramment pratiqués, qui les décourage de se conventionner. De plus, le nombre maximal de séances remboursées, fixé à huit, n'est pas toujours suffisant pour assurer un suivi complet, ce qui peut entraîner une rupture de soins chez les patients les plus précaires, qui ne peuvent poursuivre leurs séances. Il est donc de votre responsabilité de faire évoluer ce dispositif.
Enfin, quand, à la suite de l'attentat de ce week-end, j'entends le ministre de l'intérieur et des outre-mer appeler de ses vœux la possibilité de demander une injonction de soins psychiatriques, j'espère que nous aurons les moyens d'y répondre, mais j'en doute.