Collègues des groupes Les Républicains et Rassemblement national, vous avez osé déposer, main dans la main, un amendement visant à supprimer une proposition qui n'est pourtant qu'un petit geste destiné à réparer une rupture d'égalité entre les enfants et une injustice envers les mères isolées. Vous montrez ainsi une certaine hypocrisie, vous si prompts à prétendre défendre les droits des femmes et des enfants.
La France compte 2 millions de familles monoparentales, soit une famille sur quatre. Plus exposées que les autres à la précarité, elles viennent dans vos permanences parler de leurs difficultés. Elles vous ont aussi adressé des messages pour vous demander de voter ce texte qui améliorera leur sort. Et il a grand besoin d'être amélioré, ce sort ! Le dernier rapport annuel du Secours catholique nous alerte sur la situation de ces mères isolées dont le niveau de vie médian est de 583 euros par mois et qui sont touchées de plein fouet par l'inflation. En vous proposant ce texte, nous voulons éviter que, chaque année, 39 000 enfants ne perdent 187,24 euros mensuels du fait de la situation sentimentale de leur parent, en général de leur mère. Il ne faut pas déresponsabiliser les pères, dites-vous. Est-ce en plaçant les mères devant le dilemme de se remettre en couple ou de faire perdre une allocation à leur enfant que l'on va responsabiliser les pères ? Un père défaillant va-t-il être responsabilisé si l'on fait dépendre les besoins de son enfant du bon vouloir du nouveau conjoint de la mère ? En quoi est-ce votre modèle de la famille ? Je ne l'ai pas compris. À mon grand étonnement, vous semblez considérer qu'un beau-père peut remplacer un père : ce beau-père n'a ni l'autorité parentale ni la garde de l'enfant mais, puisqu'il vit avec la mère, on compte sur lui pour s'occuper de l'enfant. Or, toutes les études montrent que, dans votre sacro-saint modèle familial, ce sont les femmes qui contribuent le plus financièrement à l'éducation des enfants, quand bien même les hommes auraient de plus hauts revenus.
Vous vous dites choqués par le parallèle établi avec la déconjugalisation de l'AAH, arguant que le handicap ne disparaît pas quand on se met en couple. Les besoins de l'enfant ne disparaissent pas davantage quand sa mère se met en couple : l'enfant sera toujours en manque d'un père que le beau-père ne remplacera pas. Il est étonnant que vous ayez l'air de penser le contraire.