Je suis très heureuse d'être présente à vos côtés cet après-midi, afin d'étudier notre proposition de loi, visant à remédier au déséquilibre du marché locatif.
Il s'agit d'un sujet majeur pour nos territoires, nos élus et nos concitoyens. Notre pays connaît une crise du logement sans précédent, qui se manifeste notamment par l'augmentation incontrôlée des meublés de tourisme ces dernières années.
Je suis également particulièrement honorée d'avoir été nommée rapporteur sur ce texte, au côté de mon collègue Inaki Echaniz, député socialiste des Pyrénées-Atlantiques, que je veux tout particulièrement saluer pour le travail de qualité que nous avons mené.
Le texte que nous portons ensemble, depuis maintenant plusieurs mois, de manière transpartisane, et avec le soutien actif du président de la commission, que je tiens également à remercier pour son engagement à nos côtés, est le fruit d'un combat de longue haleine et d'une mobilisation collective de tous les acteurs de terrain.
Le constat partagé est simple. Ces dernières années, près d'un million de meublés de tourisme se sont substitués à des logements classiques, destinés à de l'habitat permanent. Cela fait maintenant plusieurs années que des études et des rapports, y compris d'organes gouvernementaux, attestent et étayent ce phénomène d'éviction ou d'attrition du logement.
J'ai moi-même eu l'occasion de travailler sur deux rapports sous cette législature, dont un avec M. Vincent Rolland, député les républicains de Savoie, qui confirment ce phénomène.
Les 800 000 meublés de tourisme sur le territoire constituent une réserve locative indéniable et se concentrent particulièrement dans les zones qui connaissent des tensions locatives à l'année.
L'objectif de ce texte n'est pas d'interdire l'usage des plateformes ni des meublés de tourisme. Nous avons besoin d'avoir une offre de tourisme adaptée et attractive sur l'ensemble de notre territoire, mais celle-ci ne doit pas se faire au détriment d'une offre de location à l'année.
Dans ma circonscription, des villages entiers se vident sous le poids des meublés de tourisme et se transforment en villages de vacances. Ce n'est pas ma conception du vivre ensemble.
Le texte que nous proposons contient plusieurs dispositions visant à traiter le sujet, en utilisant des leviers différents. Sa philosophie générale va dans le sens d'une décentralisation réelle et audacieuse. La majorité des instruments proposés repose sur une mise en œuvre à la main des élus locaux, qui sont les mieux placés pour connaître des difficultés de logement propres à leur territoire.
Les élus nous demandent plus d'agilité et de dispositifs pour agir. L'article 2 permet de mettre à disposition des territoires une véritable « boîte à outils », visant à mieux juguler les différentes dynamiques qui ont lieu sur le marché de l'habitat.
Nous proposerons notamment à cet article un amendement (n° CE176), qui prévoit, en réponse à une demande fréquemment exprimée par les élus de terrain, la faculté de l'autorité compétente en matière de plan local d'urbanisme (PLU), d'instituer dans le règlement d'urbanisme des secteurs où les constructions nouvelles à destination d'habitation sont soumises à une obligation d'usage, au titre de la résidence principale.
Cette capacité, qui sera ouverte aux seuls territoires qui connaissent un taux de résidence secondaire supérieur à 20 %, permettra aux maires et aux présidents d'établissement public de coopération intercommunale (EPCI), d'empêcher que la construction nouvelle contribue à la secondarisation du parc résidentiel. Cette mesure, à la fois forte et proportionnée, sera particulièrement utile pour les territoires concernés.
Par ailleurs, nous souhaitons traiter une question qui ne figure pas dans le texte initial, mais qui constitue un point important soulevé par l'ensemble des élus rencontrés et par la plupart des acteurs du monde du logement.
Nous sommes confrontés à un problème de connaissance du parc locatif et à des difficultés de récolte et d'accès à la donnée existante. Pourtant, le législateur avait adopté en 2016 des obligations de transmission d'informations à la charge des plateformes, qu'elles ont mis un certain temps à mettre en œuvre. De plus, le Gouvernement expérimente depuis 2022 un outil appelé « API Meublés », qui centralise les données en la matière.
Un règlement, en cours de trilogue au niveau européen, vise à renforcer les obligations de transparence des plateformes. En outre, l'article 17 du projet de la loi, visant à sécuriser et réguler l'espace numérique (SREN), en cours de navette, renforce la mise à disposition des collectivités des données pertinentes en matière de meublés de tourisme.
Pour répondre aux enjeux actuels, il nous semble nécessaire d'aller plus loin, afin d'améliorer la connaissance du parc actuel, tout en veillant à la coordination avec ces textes.
Il est ainsi proposé, avant l'article premier, une généralisation de la procédure d'enregistrement des meublés de tourisme, quels qu'ils soient. Cette procédure obligatoire permettra à l'État et aux communes de connaître précisément l'état du parc immobilier touristique, et sera donc à même d'éclairer les mesures de régulation qu'ils pourront prendre.
Nous considérons qu'il s'agit d'un préalable nécessaire à la pleine effectivité des autres mesures prévues dans le texte. Un délai de mise en application, fixé au 1er janvier 2026, permettra aux administrations concernées de mettre en place un dispositif robuste, afin de traiter des flux de déclaration qui risquent d'être conséquents.
Au-delà des outils que nous mettons à disposition des territoires, ce texte traite de la fiscalité spécifique des meublés de tourisme. Depuis trop longtemps, ce secteur profite d'une fiscalité avantageuse, qui s'ajoute au profil de rentabilité élevé du marché touristique. Nous proposons ainsi une solution alternative, visant à rééquilibrer la fiscalité de la location touristique, et à aboutir à une solution de compromis et d'équilibre budgétaire.
La mission sur la refonte de la fiscalité locative, que la Première ministre m'a confiée avec Mme Marina Ferrari, afin de favoriser la location de longue durée, rendra ses conclusions au cours de la navette parlementaire. Elle permettra, si besoin, d'affiner la proposition retenue, et d'éventuellement proposer un dispositif complémentaire, afin de favoriser la location de longue durée.
En effet, nous ne pouvons pas continuer à encourager la location de courte durée, alors que nos concitoyens, nos travailleurs et nos étudiants n'arrivent plus à se loger. Nous ne pouvons pas favoriser l'économie saisonnière à l'économie productive, au risque de sacrifier l'élan de réindustrialisation voulu par notre majorité. Plus d'un quart des entreprises rencontrent des difficultés de recrutement liées au manque de logements. Enfin, nous devons être capables de mobiliser, au niveau national, un levier fiscal pour répondre aux attentes des élus locaux, qui nous alertent depuis des mois, voire des années.